Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 25 octobre 2018, 16-23.103, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 23 juin 2016), que Mmes A..., B... C... et Marie-Claire C... (les consorts C... A...), d'une part, et M. X..., d'autre part, sont, chacun, propriétaires d'une partie d'une grange qui s'est effondrée le 27 mai 2010 ; que lui en imputant la responsabilité, les consorts C... A... ont assigné en indemnisation M. X... qui a appelé en garantie la société Groupama d'Oc (l'assureur) ; que M. X..., jugé entièrement responsable de l'effondrement de la grange, a été condamné à indemniser les consorts C... A... ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de dire que l'assureur ne doit pas sa garantie à son assuré, M. X..., au titre de l'effondrement de la toiture de sa grange, alors, selon le moyen, que si l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré, la faute dolosive, pour être retenue, suppose que soit constatée la volonté de l'assuré de créer le dommage tel qu'il s'était produit ; qu'en imputant au cas présent à M. X... une faute dolosive sans avoir constaté qu'il aurait voulu le dommage tel qu'il s'était produit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les expertises diligentées avant et après l'effondrement survenu le 27 mai 2010 avaient constaté la gravité des désordres affectant la grange en sa partie appartenant à M. X... et qu'en dépit de cette gravité apparente et de trois lettres de mise en garde que les consorts C... A... lui avaient adressées les 2 avril 2007, 24 mars et 22 octobre 2009 pour attirer son attention sur l'urgence de faire procéder à des réparations, celui-ci, qui ne pouvait ignorer qu'en l'absence de travaux de consolidation, la couverture de sa partie de grange était vouée à un effondrement certain à brève échéance, était demeuré sans réaction, la cour d'appel, qui, dans l'exercice de son pouvoir souverain, a retenu que la persistance de M. X... dans sa décision de ne pas entretenir la couverture de son immeuble manifestait son choix délibéré d'attendre l'effondrement de celle-ci, a pu en déduire qu'un tel choix, qui avait pour effet de rendre inéluctable la réalisation du dommage et de faire disparaître l'aléa attaché à la couverture du risque, constituait une faute dolosive excluant la garantie de l'assureur et a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X....

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR, par infirmation du jugement, dit que la Compagnie d'assurance GROUPAMA d'OC ne doit pas sa garantie à son assuré, Monsieur X..., au titre de l'effondrement de la toiture de sa grange ;

AUX MOTIFS QUE « Attendu que le rapport d'expertise de M. D... fait état de la gravité de la dégradation de la grange en sa partie appartenant à M. X... ; que cet expert constate le déplacement du linteau d'une des deux portes alors que celui de la porte d'écurie menace ruine ; que la couverture de cette partie de la grange s'est affaissée, le faîtage présentant une flèche de plus d'un mètre ; que les pannes intermédiaires sont désolidarisées de leur appui, l'une d'elles étant rompue ; que la charpente se trouve en équilibre instable et peut rompre à tout moment ; que la maçonnerie du mur pignon nord n'est plus protégée des intempéries et que des pierres sont déjà tombées ; que le mur de la façade avant présente un gonflement et un faux aplomb important ; que des tuiles sont en équilibre en rive de toit ; que les photographies jointes au rapport font la preuve du caractère visible des désordres et de leur gravité, rendant indispensable l'exécution d'urgence de travaux de réfection ; que, d'ailleurs, le bâtiment s'est effondré deux jours après le passage de cet expert. Attendu que la gravité de ces désordres est confirmée par le rapport d'expertise de M. E..., lequel déplore l'absence de travaux de réfection. Attendu que les attestations F... et G... produites par M. X... ne sauraient remettre en cause la gravité des désordres constatés par les deux experts alors que les photographies versées aux débats mettent clairement en évidence la perspective d'un effondrement de la couverture de la grange à brève échéance. Attendu que, nonobstant la gravité apparente des désordres et les trois courriers de mise en garde des 2 avril 2007, 24 mars et 22 octobre 2009 qu'il avait reçus des consorts C... A... par lesquels ceux-ci attiraient son attention sur la dégradation de son immeuble et l'urgence de faire procéder à des réparations, M. X... est demeuré sans réaction alors qu'il ne pouvait ignorer qu'en l'absence de travaux de consolidation, la couverture de sa partie grange était vouée à un effondrement certain à brève échéance ; que la persistance de M. X... dans sa décision de ne pas entretenir la couverture de son immeuble manifeste son choix délibéré d'attendre l'effondrement de celle-ci ; que sa faute présente un degré de gravité tel qu'elle doit être qualifiée de dolosive et justifie le refus de garantie opposé par la compagnie Groupama sur le fondement du 2éme alinéa de l'article L. 113-1 du code des assurances. » (arrêt p. 3) ;

ALORS QUE, si l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré, la faute dolosive, pour être retenue, suppose que soit constatée la volonté de l'assuré de créer le dommage tel qu'il s'était produit ; qu'en imputant au cas présent à Monsieur X... une faute dolosive sans avoir constaté qu'il aurait voulu le dommage tel qu'il s'était produit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-1 du Code des assurances. ECLI:FR:CCASS:2018:C201356
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