Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 31 janvier 2017, 15-15.983, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 622-24 du code de commerce, rendu applicable au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 du même code, et les articles 18 et 188 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que lorsque le créancier est une personne morale, il déclare régulièrement la créance par l'intermédiaire des organes habilités par la loi ; qu'en vertu des deux autres, l'agent comptable, est, par détermination de la loi et décision du gouvernement, le représentant organique de la personne morale de droit public pour le recouvrement de toutes les sommes qui lui sont dues ;

Attendu, selon l'ordonnance du juge-commissaire attaquée, rendue en dernier ressort, qu'après l'ouverture du redressement judiciaire de la société L'Estival le 1er octobre 2013, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, établissement public administratif, a déclaré une créance de 699 euros par l'intermédiaire de l'agent comptable régulièrement désigné par un arrêté ministériel du 13 juin 2014 ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable cette déclaration, le juge-commissaire retient que cet arrêté ne précise pas les tâches à accomplir par la personne désignée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'agent comptable détient par ses fonctions le pouvoir de déclarer, le juge-commissaire a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 26 janvier 2015, entre les parties, par le juge-commissaire à la procédure collective ouverte par le tribunal de commerce de Cannes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ladite ordonnance et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de commerce d'Antibes aux fins de désignation d'un juge-commissaire chargé de statuer comme juridiction de renvoi ;

Condamne la société L'Estival et M. X..., en sa qualité de mandataire judiciaire de cette société, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-sept.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour l'Office français de l'immigration et de l'intégration


Le moyen reproche à l'ordonnance attaquée d'AVOIR déclaré irrecevable la déclaration de créance de l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration ;

AUX MOTIFS QUE : « la déclaration de créance a été faite entre les mains du Mandataire Judiciaire le 03/ 10/ 2013 par la société OFII pour la somme de 699 € à titre chirographaire ; Attendu que la lettre recommandée avec AR adressée au créancier par le Mandataire Judiciaire le 02/ 06/ 2014 l'informait du rejet total de ca créance et l'invitait, conformément à l'article 622-27 du Code de Commerce à faire connaître ses explications dans le délai de 30 jours, Vu les explications adressées par le créancier au Mandataire Judiciaire, Vu les articles L622-27, L624-2, L624-3, L624-3.-1, L624-4 et R624-1, R624-2, R624-3, R624-4, R624-5 du Code de commerce ; Attendu que le créancier dûment appelé à se présenter devant nous, Juge Commissaire, par lettre recommandée avec AR en date du 09/ 09/ 2014, pour faire valoir ses observations, n'a pas comparu ni personne pour lui, a adressé un courrier en date du 15/ 09/ 2014 ; Attendu que la fonction d'Agent comptable de I'OFII ne prouve pas que le signataire était habilité à déclarer la créance ; Attendu que la déclaration s'apparente à une demande en justice, ce qui implique que le pouvoir aurait dû indiquer clairement l'autorisation de déclarer une créance, soit d'ester en justice ; Attendu que l'arrêté ministériel communiqué par le signataire de la créance est très succinct et surtout ne précise pas les tâches à accomplir par celle qui a signé ; Vu la jurisprudence de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 22/ 10/ 1996 selon laquelle la délégation de pouvoir ne peut avoir un caractère implicite ; Attendu que le Mandataire Judiciaire auquel s'associe le débiteur propose le rejet de la créance déclarée par l'OFII ; Attendu qu'il y a donc lieu de déclarer irrecevable la déclaration de créance déclarée par l'OFII »

ALORS QUE dans le poste comptable qu'il dirige au sein d'un établissement public de l'Etat, le comptable public, autrement dénommé « Agent comptable », est seul chargé du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances constatées par un contrat, un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire ; que la seule nomination de l'Agent comptable dans un établissement public implique de tels pouvoirs et en particulier celui de déclarer les créances du poste comptable concerné ; qu'en l'espèce il est constant que Madame Y..., trésorière principale du Trésor public, a été nommée en qualité d'Agent comptable de l'OFII par un arrêté du 28 septembre 2010 ; que Madame Y..., seule personne habilitée, a dûment déclaré la créance le 3 octobre 2013 pour le compte de l'OFII ; qu'il a été justifié de ce pouvoir avant le jugement par la transmission, le 13 juin 2014, de l'arrêté ministériel portant nomination de Madame Y... comme agent comptable de l'OFII ; qu'en disant la déclaration de créance irrecevable aux motifs que « la fonction d'agent comptable de l'OFII ne prouve pas que le signataire était habilité à déclarer la créance (…) que l'arrêté ministériel communiqué par le signataire de la créance est très succinct et surtout ne précise pas les tâches à accomplir par celle qui a signé » le Tribunal de Commerce a violé les articles 18, 19 et 188 du Décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ensemble les articles L. 622-24, L. 622-27, L. 624-2 et suivants et L. 631-14 du Code de commerce.ECLI:FR:CCASS:2017:CO00142
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