Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 7 décembre 2016, 15-16.769, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 17 février 2015), que la société de services en ingénierie informatique Euriware, aux droits de laquelle se trouve la société Cap Gemini France, exploite à Cherbourg une activité d'assistance téléphonique et technique destinée aux utilisateurs de matériels informatiques de la société Areva, dénommée « Help desk », cette activité étant essentiellement confiée, dans le cadre d'un contrat de prestation de services, à des salariés de la société Proservia ; qu'à la suite du dépôt d'un rapport d'expertise confié au cabinet Technologia et par acte du 21 janvier 2014, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l'établissement Ouest de la société Euriware a fait assigner les sociétés Euriware et Proservia devant le tribunal de grande instance, afin d'obtenir la suspension des objectifs fixés aux salariés du « help desk » en termes de taux de décroché, de résolution et d'intervention, ainsi que la modification des espaces de travail ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Proservia fait grief à l'arrêt de déclarer l'action du CHSCT de l'établissement Ouest de la société Euriware recevable, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article L. 4612-1 du code du travail que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure ; que pour l'application des dispositions relative à la santé et à la sécurité des travailleurs, l'article L. 4111-5 du code du travail dispose que les travailleurs sont les salariés, y compris temporaires, et les stagiaires, ainsi que toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l'autorité de l'employeur ; que n'entre pas dans la cadre de la mission du CHSCT la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs d'une entreprise sous-traitante lorsque ces derniers ne sont pas placés sous l'autorité de la société donneuse d'ordre ; qu'en considérant que le CHSCT d'Euriware Ouest était recevable à agir à l'encontre de la société Proservia au motif qu'il appartenait au CHSCT d'Euriware Ouest d'exercer son rôle à l'égard de tous les salariés travaillant sur le site de la société Euriware sans même rechercher ainsi qu'elle y était invitée si les salariés de la société Proservia étaient placés sous l'autorité de la société Euriware, et s'il existait par conséquent, un lien de subordination des salariés de Proservia à l'égard de la société Euriware, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4111-5 et L. 4612-1 du code du travail, ensemble les articles 31 et 122 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il résulte des articles L. 4111-5, L. 4612-1, R. 4511-1 et R. 4511-5 du code du travail, interprétés à la lumière de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, que le CHSCT est compétent, pour exercer ses prérogatives, à l'égard de toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l'autorité de l'employeur ;

Et attendu qu'ayant constaté que les objectifs à atteindre au sein du centre d'appels avaient été définis par la société Euriware et que les salariés de la société Proservia exerçaient largement sous le contrôle du personnel d'encadrement de la société Euriware présent sur le site, la cour d'appel en a exactement déduit que, les salariés de la société Proservia étant placés sous l'autorité tant de la société Euriware que de la société Proservia, le CHSCT de l'établissement Ouest de la société Euriware était recevable à agir à l'encontre de ces deux sociétés afin d'obtenir, au sein du site de Cherbourg relevant de son périmètre d'implantation, le respect de leurs obligations légales en matière de prévention des risques professionnels ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Proservia fait grief à l'arrêt de constater l'existence de risques graves d'atteinte à la sécurité et à la santé de ses salariés et de lui enjoindre de prendre toutes mesures propres à faire cesser la violation des obligations mises à sa charge par les dispositions légales, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en vertu de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ; qu'il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte des changements de circonstances ; qu'en vertu de l'article L. 4121-2 du code du travail, l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention en particulier, éviter les risques, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme et planifier la prévention ; qu'en vertu de l'article L. 4121-3 du code du travail, l'employeur, compte tenu de la nature des activités, évalue les risques pour la santé et la sécurité, y compris notamment dans la définition des postes de travail et, à la suite de cette évaluation, met en oeuvre les actions de prévention ; qu'il en résulte que, dans le cadre de l'obligation de prévention, il appartient à l'employeur d'identifier les risques pour la santé et la sécurité induits par l'organisation du travail ; qu'il ne peut être reproché à l'entreprise extérieure de ne pas s'être renseignée plus avant sur les risques psycho-sociaux susceptibles de se présenter notamment en ce qui concernent les objectifs à atteindre au sein de l'entreprise donneuse d'ordre, dès lors que cette dernière n'avait pas elle-même identifié ce risque ; qu'en reprochant à la société Proservia d'avoir méconnu les obligations issues des articles L. 4121-1 et L. 4122-1 du code du travail quand elle avait constaté, d'une part, que la société Euriware n'avait pas méconnu son obligation d'évaluation des risques puisqu'elle ne s'était pas opposée aux expertises sollicitées par le CHSCT et que, d'autre part, la société Euriware considérait elle-même qu'il n'existait aucun risque concernant les objectifs qu'elle avait fixés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-1 du code du travail ;

2°/ que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; qu'en énonçant que le premier facteur de risque découlait de l'organisation générale du centre d'appels qui consistait à apporter une réponse immédiate aux demandes de traitement des utilisateurs des matériels informatiques du groupe Areva avec un encadrement strict du taux de réponse apporté par les salariés du Help Desk cependant que la société Proservia était totalement étrangère au contrat de prestations de services conclu entre la société Euriware et son client Areva, et n'avait aucune connaissance des termes négociés par les sociétés Euriware et Areva, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

3°/ que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; qu'en considérant, pour dire qu'il existait de graves atteintes à la sécurité et à la santé des salariés de la société Proservia, que les salariés de la société Proservia étaient soumis à des objectif précis et à des rappels à l'ordre individuels pour le cas où ces objectifs n'auraient pas été atteints cependant que les salariés de la société Proservia n'étaient soumis à aucun objectif de performance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-1 du code du travail ;

4°/ que le juge ne peut pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'en énonçant que le deuxième facteur aggravant du risque ressortait du fait que les salariés travaillaient sous contrôle permanent de leur activité, résultant de la gestion informatisée du centre d'appels et du traitement en temps réel de l'information, laquelle était relayée par les bandeaux d'affichage placés en hauteur dans l'open-space, permettant à chacun de connaître l'état du flux des appels et le niveau de disponibilité de chaque intervenant (rapport Technologia de février 2012) quand il ressortait du rapport d'expertise du cabinet Technologia que « ces panneaux avec des informations réactualisées en continu ne semblaient pas perçus comme des moyens de pression éventuellement exercés par la hiérarchie, et qu'ils étaient pour le moment considérés comme de simple outils d'information », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce rapport et violé le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ;

5°/ que les juges du fond sont tenus de procéder à l'analyse des documents régulièrement soumis à leur examen ; qu'en énonçant que le deuxième facteur aggravant du risque ressort du fait que les salariés travaillaient sous contrôle permanent de leur activité, résultant de la gestion informatisée du centre d'appels et du traitement en temps réel de l'information, laquelle était relayée par les bandeaux d'affichage placés en hauteur dans l'open-space, permettant à chacun de connaître l'état du flux des appels et le niveau de disponibilité de chaque intervenant (rapport Technologia de février 2012) cependant qu'il résultait de la photographie de ce tableau, que ce panneau ne contenait aucune référence à l'atteinte « d'objectifs », aucune référence à une quelconque cadence de travail, aucun comparatif par rapport à des statistiques relatives à des périodes antérieures mais uniquement le flux d'appels en cours à un instant donné, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que le temps de pause ne constitue pas un temps de retrait ; qu'en énonçant qu'il apparaissait que les salariés disposaient d'une pause totale de 2 heures par jour intégrant la pause déjeuner et 2 pauses de 15 minutes, de sorte que le temps de retrait, qui consistait à ne pas prendre d'appel, s'établissait au maximum à 30 minutes par jour, la cour d'appel a confondu les notions de temps de pause et de temps de retrait et a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;


7°/ que les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en retenant que la quasi-totalité de salariés Proservia opéraient largement sous le contrôle de managers de la société Euriware quand la société Proservia observait et démontraient que les salariés de la société Proservia étaient placés sous la seule autorité et la seule responsabilité d'un manager de la société Proservia, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

8°/ que par des écritures demeurées sans réponse, la société Proservia faisait valoir que le CHSCT de la société Euriware avait purement et simplement refusé la présence de la société Proservia lors de la réunion concernant les réponses données par la direction de la société Euriware à la suite de l'expertise du cabinet Technologia concernant le recours à la sous-traitance au sein du Help Desk ; qu'en reprochant à la société Proservia de ne pas avoir coopéré à la mise en oeuvre des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail au mépris de l'article L. 4121-5 du code du travail et de n'avoir jamais participé aux réunions du CHSCT de la société Euriware Ouest sans même s'expliquer sur le moyen déterminant des écritures d'appel de la société Proservia de nature à démontrer que le CHSCT de la société Euriware n'avait pas permis à la société Proservia de prendre des mesures relatives à la santé et à la sécurité des travailleurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les objectifs et les moyens du centre d'appels avaient été définis sans qu'aucun document ni aucune norme ne permette d'apprécier la pertinence du ratio retenu d'environ 13 500 utilisateurs pour 48 salariés, que ces derniers travaillaient sous le contrôle permanent de leur activité au moyen de la gestion informatisée du centre d'appels, un bandeau d'affichage placé en hauteur diffusant l'état du flux des appels et la disponibilité des salariés présents, que si le fait de ne pas atteindre les objectifs n'était pas sanctionné sur le plan du salaire ou de l'emploi, il donnait lieu à des rappels à l'ordre individuels, dans un contexte d'exigence élevée des utilisateurs, à l'origine de conditions de travail mettant en péril la santé des salariés et enfin, que, s'il n'était pas possible de connaître le motif de l'absence de la société Proservia à la réunion organisée à la suite du dépôt du rapport du cabinet Technologia et du suicide de l'un de ses salariés, la société Proservia n'avait pris l'initiative d'aucune concertation avec la société Euriware en matière d'organisation des conditions de travail sur le site, la cour d'appel, effectuant les recherches prétendument omises et répondant aux conclusions dont elle était saisie, hors toute dénaturation, a légalement justifié sa décision ;



PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Proservia aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille seize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Proservia

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré recevable l'action du CHSCT de la société EURIWARE OUEST exercée à l'encontre de la société PROSERVIA et d'avoir en conséquence enjoint à cette dernière de prendre certaines mesures ;

AUX MOTIFS QU' il ressort des motifs du jugement du 15 mai 2014 que le tribunal de grande instance de VERSAILLES, qui n'a pas statué dans son dispositif sur le moyen, a considéré que le CHSCT d'EURIWARE OUEST était irrecevable dans son action à l'encontre de la société PROSERVIA au motif que seul le CHSCT de cette société avait compétence pour agir pour la défense des conditions de travail des salariés de PROSERVIA qui ne relèvent pas de l'autorité de la société EURIWARE ; que le CHSCT d'EURIWARE OUEST critique le jugement à ce titre au motif que les dispositions des articles L. 4612-1 et L. 4612-2 du code du travail lui donnent compétence pour agir pour la défense des conditions de travail de tous les salariés qui travaillent sur le site, sans exigence d'un lien de salariat avec la société donneuse d'ordre qui exerce son activité sur le site ; que la société PROSERVIA maintient son moyen d'irrecevabilité ajoutant que le CHSCT d'EURIWARE ne saurait se substituer au CHSCT de PROSERVIA qui n'est pas dans la cause ; que toutefois, l'article L.4612-1 du code du travail donne compétence au CHSCT pour exercer ses missions à l'égard de tous les salariés qui travaillent dans les locaux d'une société, intégrant expressément les salariés mis à disposition par une entreprise extérieure ; qu'il ressort d'ailleurs du rapport d'enquête réalisée début 2013 par le CHSCT de PROSERVIA à la suite du suicide de l'un de ses salariés qui travaillait sur le Help Desk d'EURIWARE, que ce CHSCT fait directement référence à l'expertise faite à l'initiative du CHSCT d'EURIWARE, ne s'y opposant pas, constatant que l'absence d'élus de PROSERVIA sur place ou à proximité a freiné l'éventuelle détection du risque psycho-social existant ;
que l'action des 2 CHSCT au regard des conditions de travail des salariés travaillant sur le site, n'est donc pas contradictoire, les dispositions légales permettant l'intervention du CHSCT de l'établissement au sein duquel des difficultés de travail sont susceptibles d'exister ; que par suite, il entre bien dans les attributions du CHSCT d'EURIWARE OUEST d'exercer son rôle à l'égard de tous les salariés qui travaillent sur le site, la société PROSERVIA ayant utilement qualité pour répondre aux moyens développés par le CHSCT concernant les conditions d'exécution du travail réalisé par ses propres salariés ; que dès lors, les demandes dirigées contre la société PROSERVIA sont recevables ;

ALORS QU' il résulte de l'article L. 4612-1 du code du travail que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure ; que pour l'application des dispositions relative à la santé et à la sécurité des travailleurs, l'article L. 4111-5 du code du travail dispose que les travailleurs sont les salariés, y compris temporaires, et les stagiaires, ainsi que toute personne placée à quelque titre que ce soit sous l'autorité de l'employeur ; que n'entre pas dans la cadre de la mission du CHSCT la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs d'une entreprise soustraitante lorsque ces derniers ne sont pas placés sous l'autorité de la société donneuse d'ordre ; qu'en considérant que le CHSCT D'EURIWARE OUEST était recevable à agir à l'encontre de la société PROSERVIA au motif qu'il appartenait au CHSCT D'EURIWARE OUEST d'exercer son rôle à l'égard de tous les salariés travaillant sur le site de la société EURIWARE sans même rechercher ainsi qu'elle y était invitée si les salariés de la société PROSERVIA étaient placés sous l'autorité de la société EURIWARE, et s'il existait par conséquent, un lien de subordination des salariés de PROSERVIA à l'égard de la société EURIWARE, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4111-5 et L. 4612-1 du code du travail, ensemble les articles 31 et 122 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté l'existence de risques graves d'atteinte à la sécurité et à la santé des salariés de la société PROSERVIA travaillant sur le site Viking organisé en centre d'appels exploité par la société EURIWARE en violation des articles L. 4621-1 et L. 4621-2 [ L. 4121-1 et L. 4121-2] du code du travail, et d'avoir enjoint la société PROSERVIA de prendre toutes mesures propres à faire cesser la violation caractérisée des obligations mises à sa charge par ces dispositions légales ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article L. 4621-1 [L. 4121-1] du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, ces mesures comprenant : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ; que l'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ; que l'article L. 4121-2 dispose également que l'employeur doit mettre en oeuvre ces mesures sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : 1° Éviter les risques ; 2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ; 3° Combattre les risques à la source ; 4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ; 5° Tenir compte de l'état de l'évolution de la technique ; 6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ; 7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants ; 8° Prendre les mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ; 9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs ; que l'article L. 4121-3 impose encore à l'employeur d'évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, en mettant en oeuvre si nécessaire les actions de prévention et les méthodes de travail et de production garantissant un meilleur niveau de protection, intégrant ces actions dans l'ensemble des activités de l'établissement et à tous les niveaux de l'encadrement ; que l'article L. 4121-5 ajoute que lorsque les travailleurs de plusieurs entreprises sont présents dans un même lieu de travail, les employeurs coopèrent à la mise en oeuvre des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail ; qu'en outre, il ressort de l'article L. 4612-1 du code du travail, que la mission du CHSCT a pour objet : 1 ° De contribuer à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à disposition par une entreprise extérieure ; 2° De contribuer à l'amélioration des conditions de travail ; 3° De veiller à l'observation de ces prescriptions légales en ces matières ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions légales que le CHSCT est en droit de faire constater le non-respect par l'employeur de ses obligations en cas de risques ou d'atteintes à la santé et à la sécurité des salariés sur un site de travail ; qu'en l'espèce, le CHSCT d'EURIWARE OUEST fait valoir que les sociétés EURIWARE et PROSERVIA ne respectent pas leur obligation de sécurité de résultat qui implique une obligation d'évaluation des risques et celle de prendre les mesures nécessaires pour supprimer ces risques ; que plus précisément, l'organisation mise en place pour le fonctionnement du centre d'appels, non conforme à l'obligation de sécurité, doit être annulée ou à tout le moins suspendue, dans ses aspects d'objectifs et statistiques quantitatifs chiffrés, ainsi que sur l'aménagement des locaux ; qu'en réponse, la société EURIWARE soutient que le CHSCT ne rapporte pas la preuve de la violation de son obligation de sécurité, qui ne peut pas résulter uniquement des rapports d'expertise établis par le cabinet TECHNOLOGIA ni du suicide de l'un des salariés travaillant sur le site ; que le CHSCT dont le rôle doit se limiter à la faculté de réclamer la suspension d'un nouveau projet modifiant une organisation existante, lorsque cette modification est génératrice de risques, ne peut demander la suspension du Help Desk qui s'appuie sur une convention signée avec AREVA depuis janvier 2011 ; que la société PROSERVIA fait valoir pour sa part que ses salariés ne sont pas soumis à des objectifs de performance qui en tous cas relèvent du seul pouvoir de direction, et qu'elle n'est pas concernée par le contrat conclu avec AREVA ni par l'aménagement des locaux d'EURIWARE ; qu'à titre liminaire, il convient de relever que l'obligation d'évaluation des risques a été respectée dans la mesure où les employeurs ne se sont pas opposés à la réalisation des expertises sollicitées par le CHSCT d'EURIWARE OUEST, le débat portant sur la réalité des risques relevés par le cabinet TECHNOLOGIA ; que les moyens développés par les parties doivent conduire à vérifier par suite l'existence des risques allégués par le CHSCT, lesquels sont de 2 ordres, tenant d'une part à la fixation d'objectifs quantitatifs élevés et d'autre part à la non-conformité des locaux, tout en examinant le cas échéant si les mesures prises par les sociétés ont été de nature à éviter ou combattre ces risques ; S'agissant des risques résultant de la fixation d'objectifs quantitatifs : que les sociétés considèrent qu'il n'existe pas de contraintes d'objectifs sanctionnés à titre individuel et qu'en tous cas la fixation d'objectifs qui a pour but de répondre aux attentes du client, constitue l'expression du pouvoir de direction et d'organisation de l'employeur ; que toutefois, la fixation d'objectifs élevés est susceptible d'apporter une atteinte à la santé des salariés si l'employeur ne donne pas les moyens suffisants et nécessaires pour atteindre ces objectifs, les salariés se trouvant dans l'impossibilité matérielle d'y parvenir sauf à prendre des risques graves pour leur santé ; que les pièces versées aux débats démontrent que la société EURIWARE a défini sur le centre d'appels, des objectifs très précis qui mettent en péril la santé des salariés ; que le premier facteur de risque découle de l'organisation générale du centre d'appels qui consiste à apporter une réponse immédiate aux demandes de traitement des utilisateurs des matériels informatiques du groupe AREVA avec un encadrement strict du taux de réponse apporté par les salariés du Help Desk ; que la société EURIWARE ne produit pas le contrat de prestations de services conclu avec AREVA mais il ressort du rapport d'expertise du cabinet TECHNOLOGIA du 3 février 2012 que ce contrat fixe des objectifs de décroché de 90, avec un taux d'abandon inférieur à 7, et un taux de résolution supérieur à 60 par les salariés du premier niveau d'intervention qui travaillent au sein du Help Desk ; que le rapport TECHNOLOGIA de février 2012 et celui du 4 juin 2013, confirmés par les discussions figurant au compte-rendu de réunion du 8 mars 2013 du CHSCT, relèvent que chaque appel doit être traité en moins de 7 minutes, ce qui représente en moyenne 9 dossiers par heure, sur 7 heures de travail par jour ; que la société EURIWARE communique un document intitulé « scénario de réception de l'appel et du déclenchement du calcul du taux de décroché » qui démontre que l'appel est géré en totalité dans un circuit défini par des temps de traitement de l'appel, avec un temps d'attente de l'appelant de moins de 20 secondes ; que s'agissant des moyens mis à disposition par la société pour atteindre les engagements promis à l'égard de son client AREVA, il sera relevé que le Help Desk est composé, au vu du rapport du 4 juin 2013, de 48 salariés, dont 37 salariés PROSERVIA, ces effectifs intégrant les 4 managers dont 3 sont salariés d'EURIWARE, ce qui confirme la tendance au sein d'EURIWARE d'avoir une image négative de l'activité (« on y arrive par défaut »), cette évolution devant conduire à terme à la constitution d'un service fonctionnant uniquement avec des salariés PROSERVIA sous-traitant ; que le nombre d'utilisateurs du centre d'appels n'est pas communiqué mais il ressort des rapports qu'il se situe à environ 13 500 postes pour les sociétés du groupe AREVA et 4 000 autres équipements (fax, copieurs etc.), avec des clients hors AREVA, sans plus de précision, le rapport de juin 2013 confirmant également la progression constante de l'activité depuis 2010 alors que les effectifs du Help Desk sont restés stables ; que ces éléments, non contestés, établissent l'existence d'un cadre très serré pour le traitement des incidents, avec un très grand nombre d'utilisateurs pour un petit groupe de salariés travaillant sur le centre d'appels ; que le moyen développé par EURIWARE selon lequel le risque n'existe pas puisque l'objectif du taux de décroché supérieur à 90% est atteint et en progression permanente, n'est pas déterminant dès lors que l'atteinte de cet objectif résulte de l'organisation du travail contestée, dont l'efficacité est avérée par les performances du site ; que le deuxième facteur aggravant du risque ressort du fait que les salariés travaillent sous contrôle permanent de leur activité, résultant de la gestion informatisée du centre d'appels et du traitement en temps réel de l'information, laquelle est relayée par les bandeaux d'affichage placés en hauteur dans l'open-space, permettant à chacun de connaître l'état du flux des appels et le niveau de disponibilité de chaque intervenant (rapport TECHNOLOGIA de février 2012) ; que ce contrôle informatisé est confirmé par tous les tableaux statistiques communiqués par EURIWARE qui permettent de connaître les volumes d'appels et les temps de traitement, minute par minute, qui même s'ils ne sont pas sanctionnés sur le plan des salaires ou de l'emploi, donnent lieu à des rappels à l'ordre individuels, selon le rapport de juin 2013 qui relève également que les temps de pause sont minutés ; qu'ainsi, il apparaît que les salariés disposent d'une pause totale de 2 heures par jour intégrant la pause déjeuner et 2 pauses de 15 minutes, de sorte que le temps de retrait qui consiste à ne pas prendre d'appel, s'établit au maximum à 30 minutes par jour, alors que ce temps est utilisé pour le traitement des incidents hors communication, ce qui conduit les salariés à être en situation de communication avec les utilisateurs de façon quasi ininterrompue sur la journée, les rapports relevant que ces derniers ont souvent une attitude exigeante voire méprisante, et sont dans l'attente d'une réponse immédiate à leur difficulté ; que les rapports démontrent en outre que ces temps de retrait sont insuffisants au regard des tâches nécessitées par l'activité (création d'un dossier, entretien avec un collègue, un référent ou le supérieur pour trouver une solution), le rapport de février 2012 relevant au surplus que de nombreux agents se sont plaints de facteurs ralentissant les temps de réponse, résultant du fait que les PC sont anciens et que le logiciel USD génère des pertes de temps, ce qui est « une source potentielle de stress dans le travail interactif et ce d'autant que (ces ralentissements) sont imprévisibles » ; que le rapport relève également que les techniciens ont subi une restriction de leurs droits d'administrateur du fait du projet Jupiter, ce qui a aggravé leur manque d'autonomie, facteur supplémentaire de stress ; que si la société EURIWARE fait valoir qu'il n'existe pas d'objectifs fixés à titre individuel, il convient de relever que le suivi rapproché des temps de traitement des appels, relayé par les bandeaux d'affichage, constitue un facteur d'aggravation du risque dès lors que chacun des salariés n'a pas connaissance de ses performances personnelles mais est en situation de ressentir la culpabilité de la nonréalisation des chiffres réalisés par le groupe ; que par ailleurs, la société EURIWARE produit les normes ISO de fonctionnement des centres d'appel mais ces documents ne concernent que les normes qualité qui permettent au client d'apprécier si le prestataire de services a atteint ses engagements au titre du contrat de prestation ; que la société communique également des documents relatifs au fonctionnement de centre d'appels d'entreprises publiques ou privées (CARREFOUR, CPAM, AEROPORT DE TOULOUSE) mais ces documents, très disparates, concernent tantôt des centres d'appels d'information du public, tantôt des centres de gestion des difficultés rencontrées par des opérateurs travaillant sur des logiciels d'entreprise, documents non probants en raison de la différenciation de leurs objectifs, la seule constante résultant du taux de satisfaction des utilisateurs des centres, qui doit toujours être supérieur à un taux de décroché de 90% ; qu'aucun document ne permet de vérifier si les moyens mis à disposition par la société EURIWARE pour atteindre cet objectif du taux de décroché au sein du site Viking sont suffisants, aucune norme en matière sociale n'ayant été communiquée pour apprécier le ratio entre le nombre de salariés travaillant dans le centre d'appels et le nombre d'utilisateurs ; que ces documents sont donc inopérants pour démontrer que les conditions de fonctionnement du help desk du site Viking sont satisfaisantes sur le plan de la protection et de la prévention des atteintes à la santé alors que le cabinet TECHNOLOGIA a relevé de manière très circonstanciée l'existence dans le centre d'appels de risques importants à caractère psycho-social, énumérés sous 6 rubriques dans le rapport du 4 juin 2013 : exigences du travail et charge émotionnelle fortes, insuffisance de l'autonomie et des marges de manoeuvre, rapports sociaux et relations de travail tendus, conflits de valeur et insécurité socio-économique résultant notamment de l'augmentation du recours à la sous-traitance ; que les risques allégués par le CHSCT d'EURIWARE OUEST sur le plan de l'organisation du travail sont ainsi avérés ; que l'existence de risques graves sur le plan psycho-social a été encore confirmée par le suicide d'un salarié PROSERVIA le 4 mars 2013, la commission de recours amiable ayant considéré par décision du 23 septembre 2013 que l'acte présentait un lien direct avec les conditions de travail ; qu'au vu du rapport TECHNOLOGIA du 4 juin 2013, il apparaît que le jour du suicide, une nouvelle organisation du travail avait été mise en place avec désignation d'un référent par équipe, alors que le CHSCT n'avait pas été consulté sur cette nouvelle organisation ; que cet élément démontre que malgré les résolutions votées par le CHSCT depuis 2010 et la mesure d'expertise en cours, décidée à l'unanimité le 13 novembre 2012, les employeurs n'avaient pas pris les mesures utiles destinées à réduire les risques psycho-sociaux existants ; qu'il n'est pas contestable que la société PROSERVIA n'a pris aucune mesure, considérant que seule la société EURIWARE pouvait être à l'origine de décisions applicables sur le site, concernant l'organisation des conditions de travail ; que la réunion extraordinaire du CHSCT du 8 mars 2013 confirme, à la demande de l'inspecteur du travail, que la société PROSERVIA n'a jamais participé aux réunions relatives au fonctionnement du help desk, sans qu'il soit possible de déterminer si cette société avait refusé les invitations d'EURIWARE, ses conclusions révélant en tous cas qu'elle n'a pas pris d'initiative de concertation avec EURIW ARE alors que le site fonctionne actuellement avec la quasi-totalité de salariés PROSERVIA qui opèrent largement sous le contrôle de managers EURIWARE ; que ce choix des sociétés qui consiste à désengager la société PROSERVIA de l'organisation du centre d'appels, est en tous cas contraire aux dispositions de l'article L. 4121-5 selon lequel lorsque les travailleurs de plusieurs entreprises sont présents dans un même lieu de travail, les employeurs coopèrent à la mise en oeuvre des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail ; que de son côté, la société EURIWARE met en avant un certain nombre de mesures résultant en premier lieu de la mise en place d'une cellule d'écoute et d'accompagnement par le cabinet Stimulus, dont il convient de considérer que son rôle n'est pas suffisant pour faire face aux risques dénoncés par le CHSCT puisqu'il ressort du document communiqué par la société que, malgré son intervention depuis 2010, le nombre de nouveaux salariés s'adressant à la cellule d'écoute est en augmentation constante, et significative en 2013, de 5 salariés en 2012 à 24 en 2013, ce qui représente la moitié des effectifs du centre d'appels ; que de même, la remise d'un livret d'accueil aux nouveaux salariés travaillant sur le Help Desk ne peut être considérée comme une mesure suffisante pour faire face aux risques dénoncés, ce livret présentant l'avantage essentiel de définir les niveaux de résolution des appels, 1, 2 ou 3, mais sans être à la hauteur des risques résultant des objectifs quantitatifs élevés ; que le logiciel USD, mis en oeuvre en novembre 2012, n'a pas apporté d'amélioration dans les conditions de travail du Help Desk, les salariés se plaignant au contraire d'un alourdissement de leur charge de travail en devant remplir les données précises du logiciel, ce qui ralentit leur activité et constitue un outil de contrôle de leur efficacité ; que les réponses du 14 juin 2013 aux recommandations du cabinet TECHNOLOGIA, prévoient notamment des renforts pour faire évoluer le service et permettre de gérer en totalité les incidents des utilisateurs, mais la société EURIWARE ne communique aucune pièce justificative sur la mise en oeuvre de ces renforts, ni sur les autres propositions matérielles (augmentation des réunions hebdomadaires, valorisation du service, pérenniser les effectifs, reconnaissance de la qualité du travail ... ) ; que par ailleurs, si la société EURIWARE fait valoir que seuls les nouveaux projets modifiant une organisation existante peuvent faire l'objet d'une suspension, il convient de noter que l'action du CSHCT dont la recevabilité n'a pas été contestée sur ce plan, n'est pas fondée sur l'article L. 4614-12 du code du travail concernant la mise en oeuvre de nouveaux projets mais sur la violation caractérisée des obligations mises à la charge de l'employeur par les articles L. 4621-1 et L. 4621-2 [L. 4121-1 et L. 4121-2] du code du travail concernant une organisation de travail déjà existante et l'octroi des moyens adaptés en matière de protection de la santé et de la sécurité des salariés ; qu'il doit être souligné que les conditions actuelles de fonctionnement n'ont pas été modifiées malgré les alertes existantes depuis 2010, le cabinet d'expertise COEXCO ayant relevé dès octobre 2010 un climat particulièrement stressant où la pression de l'encadrement du help desk était vécue comme du harcèlement ; que le rapport TECHNOLOGIA du 3 février 2012, mandaté le 10 juin 2011, avait conclu à l'existence de risques psychosociaux importants, une surcharge de travail, des pratiques managériales démotivantes et des tensions entre les salariés ; que le deuxième rapport TECHNOLOGIA concluait avant le suicide de mars 2013, à l'existence de facteurs de risques psycho-sociaux dans une « situation qui n'est pas satisfaisante voire tout à fait inquiétante » ; qu'enfin, depuis le dépôt du rapport définitif TECHNOLOGIA du 4 juin 2013, les sociétés EURIWARE et PROSERVIA ne démontrent pas que des mesures adaptées ont été prises au sein du centre d'appels en vue de réduire et de prévenir les risques psychosociaux, notamment en termes d'organisation du travail et de moyens accordés pour satisfaire à la demande du client ; qu'en particulier, le tableau récapitulatif des actions menées depuis 2010, qui émane des services de la société EURIWARE alors qu'une telle étude n'est convaincante que si elle émane d'un organisme extérieur, vise des actions insuffisantes, précédemment examinées (dont essentiellement la cellule d'écoute et les réunions de travail) alors qu'il n'a pas été remédié à la cause du risque, résultant d'objectifs quantitatifs élevés fixés collectivement aux salariés du centre d'appels ; que les dispositions légales ne permettant pas de suspendre ou d'interdire l'activité mise en place par la société EURIWARE, dans les conditions sollicités par le CHSCT, il sera fait injonction aux sociétés EURIWARE et PROSERVIA de prendre toutes mesures propres à faire cesser la violation caractérisée des obligations mise à leur charge par les articles L. 4621-1 et L. 4621-2 [ L. 4121-1 et L. 4121-2] du code du travail ;

1° ALORS QU'en vertu de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que ces mesures comprennent des actions de prévention des risques professionnels et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ; qu'il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte des changements de circonstances ; qu'en vertu de l'article L. 4121-2 du code du travail, l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention en particulier, éviter les risques, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme et planifier la prévention ; qu'en vertu de l'article L. 4121-3 du code du travail, l'employeur, compte tenu de la nature des activités, évalue les risques pour la santé et la sécurité, y compris notamment dans la définition des postes de travail et, à la suite de cette évaluation, met en oeuvre les actions de prévention ; qu'il en résulte que, dans le cadre de l'obligation de prévention, il appartient à l'employeur d'identifier les risques pour la santé et la sécurité induits par l'organisation du travail ; qu'il ne peut être reproché à l'entreprise extérieure de ne pas s'être renseignée plus avant sur les risques psycho-sociaux susceptibles de se présenter notamment en ce qui concernent les objectifs à atteindre au sein de l'entreprise donneuse d'ordre, dès lors que cette dernière n'avait pas elle-même identifié ce risque ; qu'en reprochant à la société PROSERVIA d'avoir méconnu les obligations issues des articles L. 4121-1 et L. 4122-1 du code du travail quand elle avait constaté, d'une part, que la société EURIWARE n'avait pas méconnu son obligation d'évaluation des risques puisqu'elle ne s'était pas opposée aux expertises sollicitées par le CHSCT et que, d'autre part, la société EURIWARE considérait elle-même qu'il n'existait aucun risque concernant les objectifs qu'elle avait fixés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-1 du code du travail ;

2° ALORS QUE l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; qu'en énonçant que le premier facteur de risque découlait de l'organisation générale du centre d'appels qui consistait à apporter une réponse immédiate aux demandes de traitement des utilisateurs des matériels informatiques du groupe AREVA avec un encadrement strict du taux de réponse apporté par les salariés du Help Desk cependant que la société PROSERVIA était totalement étrangère au contrat de prestations de services conclu entre la société EURIWARE et son client AREVA, et n'avait aucune connaissance des termes négociés par les sociétés EURIWARE et AREVA, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

3° ALORS QUE l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; qu'en considérant, pour dire qu'il existait de graves atteintes à la sécurité et à la santé des salariés de la société PROSERVIA, que les salariés de la société PROSERVIA étaient soumis à des objectif précis et à des rappels à l'ordre individuels pour le cas où ces objectifs n'auraient pas été atteints cependant que les salariés de la société PROSERVIA n'étaient soumis à aucun objectif de performance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 4121-1 et L. 4121-1 du code du travail ;

4° ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; qu'en énonçant que le deuxième facteur aggravant du risque ressortait du fait que les salariés travaillaient sous contrôle permanent de leur activité, résultant de la gestion informatisée du centre d'appels et du traitement en temps réel de l'information, laquelle était relayée par les bandeaux d'affichage placés en hauteur dans l'open-space, permettant à chacun de connaître l'état du flux des appels et le niveau de disponibilité de chaque intervenant (rapport TECHNOLOGIA de février 2012) quand il ressortait du rapport d'expertise du cabinet TECHNOLOGIA que « ces panneaux avec des informations réactualisées en continu ne semblaient pas perçus comme des moyens de pression éventuellement exercés par la hiérarchie, et qu'ils étaient pour le moment considérés comme de simple outils d'information », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce rapport et violé le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ;

5° ALORS QUE les juges du fond sont tenus de procéder à l'analyse des documents régulièrement soumis à leur examen ; qu'en énonçant que le deuxième facteur aggravant du risque ressort du fait que les salariés travaillaient sous contrôle permanent de leur activité, résultant de la gestion informatisée du centre d'appels et du traitement en temps réel de l'information, laquelle était relayée par les bandeaux d'affichage placés en hauteur dans l'open-space, permettant à chacun de connaître l'état du flux des appels et le niveau de disponibilité de chaque intervenant (rapport TECHNOLOGIA de février 2012) cependant qu'il résultait de la photographie de ce tableau, que ce panneau ne contenait aucune référence à l'atteinte «d'objectifs», aucune référence à une quelconque cadence de travail, aucun comparatif par rapport à des statistiques relatives à des périodes antérieures mais uniquement le flux d'appels en cours à un instant donné, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

6° ALORS QUE l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ; que le temps de pause ne constitue pas un temps de retrait ; qu'en énonçant qu'il apparaissait que les salariés disposaient d'une pause totale de 2 heures par jour intégrant la pause déjeuner et 2 pauses de 15 minutes, de sorte que le temps de retrait, qui consistait à ne pas prendre d'appel, s'établissait au maximum à 30 minutes par jour, la cour d'appel a confondu les notions de temps de pause et de temps de retrait et a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ;

7° ALORS QUE les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en retenant que la quasi-totalité de salariés PROSERVIA opéraient largement sous le contrôle de managers de la société EURIWARE quand la société PROSERVIA observait et démontraient que les salariés de la société PROSERVIA étaient placés sous la seule autorité et la seule responsabilité d'un manager de la société PROSERVIA, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

8° ALORS QUE par des écritures demeurées sans réponse, la société PROSERVIA faisait valoir que le CHSCT de la société EURIWARE avait purement et simplement refusé la présence de la société PROSERVIA lors de la réunion concernant les réponses données par la direction de la société EURIWARE à la suite de l'expertise du cabinet TECHNOLOGIA concernant le recours à la sous-traitance au sein du Help Desk ; qu'en reprochant à la société PROSERVIA de ne pas avoir coopéré à la mise en oeuvre des dispositions relatives à la santé et à la sécurité au travail au mépris de l'article L. 4121-5 du code du travail et de n'avoir jamais participé aux réunions du CHSCT de la société EURIWARE OUEST sans même s'expliquer sur le moyen déterminant des écritures d'appel de la société PROSERVIA de nature à démontrer que le CHSCT de la société EURIWARE n'avait pas permis à la société PROSERVIA de prendre des mesures relatives à la santé et à la sécurité des travailleurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2016:SO02316
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