Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 7 juillet 2016, 14-29.148, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 mai 2014), que la SCI Marjebes, propriétaire de deux appartements donnés à bail à Mme X..., lui a délivré deux congés pour reprise au profit de l'un de ses associés ; que Mme X... a contesté la validité des congés au motif qu'aucune offre de relogement ne lui avait été proposée ;

Attendu que la SCI Marjebes fait grief à l'arrêt d'annuler les congés, alors selon le moyen :

1°/ que dans ses conclusions d'appel déposées et notifiées le 19 juillet 2013, la SCI Marjebes ne soutenait aucunement que le bénéficiaire des congés aux fins de reprise délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria X... était, non plus M. Sébastien Alain Y... figurant en cette qualité dans l'acte, mais M. Jean-Luc Y... ; qu'en énonçant que « la SCI Marjebes ne peut, sauf à détourner les dispositions légales précitées, se prévaloir désormais de ce que le bénéficiaire de la reprise serait M. Jean-Luc Y... pour prétendre bénéficier de la dispense précédemment rappelée », la cour d'appel a dénaturé les conclusions susvisées et a violé l'article 1134 du code civil ;

2°/ qu'aux termes de l'article 13 a) de la loi du 6 juillet 1989, les dispositions de l'article 15 peuvent être invoquées lorsque le bailleur est une société civile immobilière constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, par la société au profit de l'un des associés ; qu'il suffit, pour que celle-ci puisse délivrer un congé aux fins de reprise sans offre de relogement du locataire âgé de plus de soixante-dix ans et de ressources modestes, que l'un des associés de la société civile immobilière soit âgé de plus de soixante ans à l'échéance du contrat de bail ; qu'en énonçant que la SCI Marjebes, bailleur personne morale, ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 15-III, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989, au profit de l'un de ses membres quoiqu'elle soit une société civile familiale, dès lors que ces dispositions ne peuvent bénéficier qu'à un bailleur personne physique, la cour d'appel a violé les articles 13 a), 15-I et 15-III de la loi du 6 juillet 1989 ;

3°/ que les conditions d'âge et de ressources définies par l'article 15-III, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989 s'apprécient en la personne du bailleur et non du bénéficiaire du congé aux fins de reprise ; qu'en prononçant la nullité des deux congés délivrés le 30 mai 2012 par la SCI Marjebes à Mme Maria X... aux motifs inopérants que M. Sébastien Alain Y..., désigné dans ces actes en qualité de bénéficiaire de la reprise des deux appartements, était âgé de 35 ans à la date de délivrance du congé, la cour d'appel a violé les articles 13 a), 15-I et 15-III de la loi du juillet 1989 ;

4°/ que les dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 peuvent être invoquées lorsque le bailleur est une société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, par la société au profit de l'un des associés ; que lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que les deux congés délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria X... par la SCI Marjebes mentionnaient en qualité de bénéficiaire de la reprise, « M. Sébastien Alain Y..., né le 23 septembre 1976 à Manosque (04) dont l'adresse actuelle est ..., associé de la société civile immobilière de famille, la SCI Marjebes » ; qu'en énonçant, pour prononcer la nullité des deux congés délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria X..., que la SCI Marjebes ne pouvait, sauf à détourner les dispositions légales des articles 13 a), 15-I et 15-III de la loi du 6 juillet 1989, se prévaloir de ce que M. Jean-Luc Y..., lui-même associé de la société civile immobilière, était âgé de plus de soixante ans pour être dispensée de l'obligation de présenter au locataire âgé une offre de relogement, sans caractériser dans ses motifs la fraude affectant ces congés, la cour d'appel a violé les dispositions précitées ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu que la bailleresse, personne morale, ne pouvait se prévaloir au profit de l'un de ses associés de la dispense d'offre de relogement réservée par l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 au bailleur personne physique et constaté que la locataire, qui était âgée de plus de 70 ans et dont les ressources étaient inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance, n'avait bénéficié d'aucune offre de relogement, la cour d'appel a déduit, à bon droit, de ces seuls motifs, que les congés étaient irréguliers et devaient être annulés ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la SCI Marjebes aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Marjebes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Delaporte et Briard, avocat aux Conseils, pour la SCI Marjebes.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la nullité des congés délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria Z..., débouté en conséquence la SCI Marjebes de l'ensemble de ses demandes et dit que le contrat de bail dont bénéficie Mme Maria Z... et venant à échéance le 8 décembre 2012 sera renouvelé conformément aux dispositions légales,

Aux motifs que « les articles 15 I et II et 13 de la loi du 6 juillet 1989, permettent au bailleur, société civile familiale, de donner congé à son locataire pour vente ou reprise dans les conditions de fond et de forme rappelées par leurs dispositions ; que le bailleur, quoiqu'il soit une société civile familiale est en revanche tenu par l'article 15 III de la même loi, de reloger son locataire âgé de plus de 65 ans et dont les ressources annuelles sont inférieures au SMIC ; que pour autant, le même article dispense de cette obligation le bailleur, personne physique âgée de plus de soixante-cinq ans ou dont les ressources annuelles sont inférieures au plafond de ressources mentionné au premier alinéa ; que la SCI Marjebes, bailleur personne morale, ne peut, ainsi que l'a justement rappelé la décision déférée, se prévaloir de ces dispositions au profit de l'un de ses membres dès lors que ces dernières ne peuvent bénéficier qu'à un bailleur personne physique ; que la SCI Marjebes se prévaut au surplus des dispositions précitées de l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 à raison de l'âge de M. Jean-Luc Y..., né le 18 avril 1948, âgé par conséquent de 64 ans à la date d'échéance du contrat pour s'estimer dispensée de l'obligation de relogement précédemment rappelé ; que le congé du 30 mai 2012 pour reprise a été délivré au profit de M. Sébastien Alain Y..., né le 23 septembre 1976, âgé par conséquent de 35 ans à la date de délivrance du congé ; que la SCI Marjebes ne peut par conséquent et sauf à détourner les dispositions légales précitées, se prévaloir désormais de ce que le bénéficiaire de la reprise serait M. Jean-Luc Y... pour prétendre bénéficier de la dispense précédemment rappelée ; que le jugement déféré a rappelé que Mme Maria A... Z... était âgée de plus de 70 ans et qu'elle percevait, ainsi que le démontraient ses bulletins de pension et avis d'imposition, des ressources inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance ; que la nullité des congés signifiés le 30 mai 2012 a donc été justement retenue par la décision critiquée en l'absence d'offre de logement de remplacement conforme aux prescriptions de l'article 15-III de la loi du 6 juillet 1989 et le contrat de bail de Mme Maria A... Z... venant à échéance le 8 décembre 2012 sera dès lors jugé renouvelé conformément aux dispositions légales » (arrêt, p. 4 et s.) :

Alors, en premier lieu, que dans ses conclusions d'appel déposées et notifiées le 19 juillet 2013, la SCI Marjebes ne soutenait aucunement que le bénéficiaire des congés aux fins de reprise délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria Z... était, non plus M. Sébastien Alain Y... figurant en cette qualité dans l'acte, mais M. Jean-Luc Y... ; qu'en énonçant que « la SCI Marjebes ne peut, sauf à détourner les dispositions légales précitées, se prévaloir désormais de ce que le bénéficiaire de la reprise serait M. Jean-Luc Y... pour prétendre bénéficier de la dispense précédemment rappelée », la cour d'appel a dénaturé les conclusions susvisées et a violé l'article 1134 du code civil,

Alors, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 13 a) de la loi du 6 juillet 1989, les dispositions de l'article 15 peuvent être invoquées lorsque le bailleur est une société civile immobilière constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, par la société au profit de l'un des associés ; qu'il suffit, pour que celle-ci puisse délivrer un congé aux fins de reprise sans offre de relogement du locataire âgé de plus de soixante-dix ans et de ressources modestes, que l'un des associés de la société civile immobilière soit âgé de plus de soixante ans à l'échéance du contrat de bail ; qu'en énonçant que la SCI Marjebes, bailleur personne morale, ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 15-III, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989, au profit de l'un de ses membres quoiqu'elle soit une société civile familiale, dès lors que ces dispositions ne peuvent bénéficier qu'à un bailleur personne physique, la cour d'appel a violé les articles 13 a), 15-I et 15-III de la loi du 6 juillet 1989,

Alors, en troisième lieu, que les conditions d'âge et de ressources définies par l'article 15-III, alinéa 2, de la loi du 6 juillet 1989 s'apprécient en la personne du bailleur et non du bénéficiaire du congé aux fins de reprise ; qu'en prononçant la nullité des deux congés délivrés le 30 mai 2012 par la SCI Marjebes à Mme Maria Z... aux motifs inopérants que M. Sébastien Alain Y..., désigné dans ces actes en qualité de bénéficiaire de la reprise des deux appartements, était âgé de 35 ans à la date de délivrance du congé, la cour d'appel a violé les articles 13 a), 15-I et 15-III de la loi du juillet 1989,

Alors, en quatrième lieu, que les dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 peuvent être invoquées lorsque le bailleur est une société civile constituée exclusivement entre parents et alliés jusqu'au quatrième degré inclus, par la société au profit de l'un des associés ; que lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que les deux congés délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria Z... par la SCI Marjebes mentionnaient en qualité de bénéficiaire de la reprise, « M. Sébastien Alain Y..., né le 23 septembre 1976 à Manosque (04) dont l'adresse actuelle est ..., associé de la société civile immobilière de famille, la SCI Marjebes » ; qu'en énonçant, pour prononcer la nullité des deux congés délivrés le 30 mai 2012 à Mme Maria Z..., que la SCI Marjebes ne pouvait, sauf à détourner les dispositions légales des articles 13 a), 15-I et 15-III de la loi du 6 juillet 1989, se prévaloir de ce que M. Jean-Luc Y..., lui-même associé de la société civile immobilière, était âgé de plus de soixante ans pour être dispensée de l'obligation de présenter au locataire âgé une offre de relogement, sans caractériser dans ses motifs la fraude affectant ces congés, la cour d'appel a violé les dispositions précitées.

ECLI:FR:CCASS:2016:C300828
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