Cour de cassation, civile, Chambre civile 2, 19 mars 2015, 14-12.339, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que le juge doit, en toute circonstance, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ;

Attendu, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, que M. Francis X...a formé une demande de traitement de sa situation auprès d'une commission de surendettement des particuliers qui l'a déclaré irrecevable par décision du 12 décembre 2011 aux motifs de l'absence de surendettement, d'autorité de la chose jugée et de situation inchangée depuis le précédent jugement du 12 septembre 2011 ayant déclaré sa demande irrecevable ; qu'il a formé un recours contre cette décision ;

Attendu que pour le déclarer irrecevable en sa demande de traitement de sa situation de surendettement, le tribunal retient que M. Francis X...s'est rendu coupable d'un détournement de tout ou partie de ses biens, au sens des dispositions de l'article L. 333-2 du code de la consommation et qu'il est, en application de ces mêmes dispositions, déchu de son droit à bénéficier d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement ;

Qu'en statuant ainsi, sans recueillir les observations du débiteur sur le moyen tiré de la déchéance encourue pour détournement de tout ou partie de ses biens au sens des dispositions de l'article L. 333-2 du code de la consommation qu'il relevait d'office, le tribunal a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré recevable le recours formé par M. Francis X...contre la décision prise à son égard par la commission de surendettement des particuliers du Loir-et-Cher le 12 décembre 2011, le jugement rendu le 13 mai 2013, entre les parties, par le juge du tribunal d'instance de Blois ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le juge du tribunal d'instance d'Orléans ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Francis X...;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. Francis X...

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de M. X...d'admission au bénéfice d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement ;

AUX MOTIFS QU'en ce qui concerne le premier motif d'irrecevabilité retenu par la Commission de surendettement, à savoir l'absence supposée de surendettement de M. X..., ce motif est infondé eu égard aux pièces du dossier ; qu'en effet, il résulte de l'état descriptif de la situation du débiteur au 12 décembre 2011 que les ressources mensuelles de celui-ci sont de 791 euros, alors que ses charges mensuelles s'élèvent à un montant supérieur, soit 992 euros ; que de plus, il ressort de l'état des créances au 12 décembre 2011 que le montant total de l'endettement de M. X...est de 302. 692, 85 euros, alors que, selon l'état descriptif précité, le patrimoine de ce dernier se compose seulement d'un bien immobilier d'une valeur de 70. 000 euros ;

que dès lors, il apparaît que M. X...se trouve manifestement en situation de surendettement ;

qu'en ce qui concerne le second motif d'irrecevabilité retenu par la Commission de surendettement, à savoir l'autorité de la chose jugée qui s'attacherait au jugement rendu par le Tribunal d'instance de BLOIS le 12 septembre 2011, M. X...soutient que ce motif serait infondé, car à l'occasion de l'instance ayant donné lieu à ce jugement, il demandait à bénéficier d'une procédure de surendettement, alors que dans le cadre de la présente instance, il demande à bénéficier d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire, ce qui constituerait une demande nouvelle ;

qu'effectivement, eu égard à la demande nouvelle formulée par M. X..., il n'est pas possible de considérer que l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement susvisé rendu le 12 septembre 2011, qui avait déclaré irrecevable la demande de celui-ci tendant à bénéficier d'une procédure de surendettement, doit conduire au rejet automatique de la demande formée par M. X...dans le cadre de la présente instance ;

que cependant, il peut être tenu compte des motifs dudit jugement dans le cadre du prononcé de la présente décision, l'article L. 333-2 du Code de la consommation disposant « qu'est déchue du bénéfice des dispositions du présent titre (¿) toute personne qui aura détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens », sans distinguer selon que le débiteur entend bénéficier de mesures de traitement de sa situation de surendettement ou d'une procédure de rétablissement personnel ;

que certes, ainsi que l'avait relevé le jugement susvisé, l'absence de bonne foi de M. X...n'est pas établie par les éléments du dossier ;

qu'en particulier, bien qu'un précédent jugement rendu par le Tribunal d'instance de BLOIS le 6 janvier 2010 mentionne dans ses motifs que la société SNS « justifie que M. X...fait usage d'un faux nom », à savoir le nom de François Nicolas X..., ce fait n'est pas significatif quant à sa bonne ou mauvaise foi, car il résulte de la photocopie de la carte d'identité de M. X...figurant dans son dossier de surendettement que celui-ci a pour prénoms et nom d'usage « François-Nicolas X... » ; que dès lors, l'utilisation de ces prénoms et de ce prénom d'usage, notamment dans la vie courante et dans le cadre de procédures judiciaires, n'était pas de nature à créer une confusion sur son identité ;

qu'en ce qui concerne la non-déclaration, dans le cadre de la précédente demande de M. X...tendant à bénéficier d'une procédure de surendettement, de parts détenues dans deux sociétés, ce grief ne peut être retenu à l'encontre de M. X..., ce dernier n'étant pas détenteur de parts de la SCI du 7 rue Marcel Proust depuis le 28 octobre 2008, et les parts détenues par ce dernier au sein de la société DCE ULTRAMARINE (au capital social de 2. 500 euros) ayant une valeur dérisoire par rapport au montant de son endettement ;

que toutefois, M. X...reconnaît dans ses conclusions déposées à l'audience du Tribunal d'instance de BLOIS le 20 juin 2011 (et figurant dans ses pièces produites dans le cadre de la présente instance) qu'il a perçu une somme totale d'environ 195. 000 ¿ suite à la vente de biens immobiliers, et que seule une très faible partie de cette somme a servi à rembourser ses créanciers (il indique avoir remboursé 2. 060, 53 ¿ au LCL et 3. 049, 07 ¿ à FINAREF), le reste ayant été distribué à des amis et à ses frères et soeurs, qui « n'ont jamais cessé de le soutenir depuis sa perte d'emploi » ;

que M. X...reconnaît donc lui-même qu'il a soustrait à ses créanciers la somme de 195. 000 ¿-2. 060, 53 ¿-3. 049, 07 ¿ = 189. 890, 40 ¿ provenant de la vente de ses biens immobiliers, ce qui constitue un détournement de tout ou partie de ses biens, au sens des dispositions de l'article L. 333-2 du Code de la consommation ;

que dès lors, en application de des dispositions, M. X...est déchu de son droit à bénéficier d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement (qui aurait pu prendre la forme d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire, si la Commission de surendettement, postérieurement à une éventuelle décision de recevabilité, avait orienté le dossier vers cette dernière procédure et transmis le dossier au juge du Tribunal d'instance aux fins d'ouverture de celle-ci) ;

qu'en conséquence, il convient de confirmer la décision prise par la Commission de surendettement et de déclarer irrecevable la demande de M. X...d'admission au bénéfice d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement ;

1°) ALORS QUE les motifs d'une décision, seraient-ils le soutien nécessaire du dispositif, n'ont pas autorité de la chose jugée ; qu'en se fondant sur les motifs du jugement rendu le 12 septembre 2011 par le Tribunal d'instance de BLOIS pour estimer que M. X...aurait détourné tout ou partie de ses biens ce qui entraîne la déchéance de son droit à bénéficier d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement, le Tribunal a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble l'article L. 333-2 du Code de la consommation ;

2°) ALORS QUE l'aveu judiciaire ne peut être divisé contre son auteur ; que dans ses conclusions ayant donné lieu au jugement du 12 septembre 2011, M. X...avait soutenu que les sommes provenant de la vente de ses biens immobiliers avaient servi non seulement à désintéresser le LCL (2. 060, 53 ¿) et FINAREF (3. 049, 07 ¿) mais également des amis et des frères et soeurs lesquels étaient également ses créanciers et à payer des remboursements mensuels de prêts à hauteur de 4. 000 ¿ par mois jusqu'au mois de décembre 2009 ; qu'en énonçant que M. X...avait reconnu n'avoir désintéressé que le LCL pour 2. 060, 53 ¿ et FINAREF pour 3. 049, 07 ¿ avec l'argent provenant de la vente de ses immeubles et qu'il avait ainsi reconnu lui-même qu'il avait soustrait à ses créanciers la somme de 189. 890, 40 ¿, le Tribunal a divisé l'aveu judiciaire contre M. X..., violant l'article 1356 du Code civil ;

3°) ALORS QUE dans ses conclusions ayant donné lieu au jugement du 12 septembre 2011, M. X...avait soutenu que l'intégralité des sommes provenant de la vente de ses immeubles avait servi à régler ses créanciers (LCL, FINAREF, amis, frères et soeurs et 4. 000 ¿/ mois de remboursement de prêts) ; qu'en énonçant que dans lesdites conclusions, M. X...avait reconnu n'avoir désintéressé que le LCL et FINAREF et avoir ainsi soustrait à ses créanciers la somme de 189. 890, 40 ¿, le Tribunal a dénaturé les conclusions susvisées, violant l'article 1134 du Code civil ;

4°) ALORS QUE dans ses conclusions prises devant le Tribunal, M. X...avait précisé, preuves à l'appui, les règlements effectués auprès de ses créanciers au moyen des fonds provenant de la vente de ses biens immobiliers précisant qu'il avait employé intégralement le produit de ses ventes de 2009 à désintéresser ses créanciers au marc le franc en appliquant volontairement les calculs d'une distribution par contribution à tous ses créanciers ; qu'en s'abstenant totalement de viser ses conclusions, de les examiner et d'y répondre, le Tribunal a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

ECLI:FR:CCASS:2015:C200444
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