Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 23 janvier 2013, 11-23.428, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 juin 2011), que Mme X... a été engagée le 15 octobre 2008 par la société Performance marketing 6 pm en qualité de consultante junior avec une période d'essai de trois mois qui a été renouvelée pour la même durée ; que l'employeur a mis fin à l'essai le 14 avril 2009, avisant la salariée qu'elle bénéficierait d'un délai de prévenance d'un mois à compter de cette date, cesserait son activité dès le 14 avril 2009 mais percevrait son salaire jusqu'au 14 mai 2009 ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant au paiement de diverses sommes au titre de la rupture abusive de son contrat de travail alors, selon le moyen, que la période d'essai ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance ; que la période couverte par le délai de prévenance et postérieure au terme de la période d'essai ne peut s'analyser en une période d'essai ; que la rupture du contrat survenue dans ces conditions s'analyse dès lors incontestablement en un licenciement de droit commun et non en une rupture de période d'essai ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-25 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant constaté que l'employeur avait mis fin à la période d'essai avant son terme, en a exactement déduit que la rupture ne s'analysait pas en un licenciement, alors même que cet employeur n'avait pas respecté le délai de prévenance ; que le moyen n'est pas fondé ;


Sur le deuxième moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de limiter les sommes dues au titre des heures supplémentaires alors, selon le moyen, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en la déboutant de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et congés payés y afférents quand, en présence de feuilles de temps informatiques établies quotidiennement et de courriers électroniques établissant l'existence de dépassements d'horaires, elle devait exiger de l'employeur qu'il lui fournisse les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, et former sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve produits devant elle, la cour d'appel a estimé qu'une partie seulement des heures supplémentaires revendiquées était justifiée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé alors, selon le moyen :

1°/ que constitue le délit de travail dissimulé le fait pour l'employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué dont l'employeur a une parfaite connaissance caractérise l'élément intentionnel de l'infraction ; que la cour d'appel, qui a constaté que le nombre des heures de travail réellement effectué résultait de feuilles de temps informatiques établies quotidiennement, dont l'employeur était en conséquence en possession, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail ;

2°/ qu'en excluant l'élément intentionnel sans préciser les raisons pour lesquelles l'employeur avait fait figurer sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des mêmes textes ;

Mais attendu que la dissimulation d'emploi salarié prévue par l'article L. 8221-5 du code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que les juges du fond apprécient souverainement l'existence d'une telle intention ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme X... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Sarah X... de ses demandes tendant au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés y afférents, de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement et de dommages-intérêts pour rupture abusive.

AUX MOTIFS QUE l'article L. 1221-25 du Code du travail dispose que lorsqu'il est mis fin par l'employeur au contrat, en cours ou au terme de la période d'essai, le salarié est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois après trois mois de présence ; la période d'essai, renouvellement inclus, ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance, Ce texte fait obligation à l'employeur de prévenir, c'est-à-dire d'informer à l'avance, le salarié qu'il met fin au contrat de travail ; qu'eu égard à la durée de l'essai et celui-ci se terminant le 14 avril 2009, la société Performance Marketing 6 PM devait prévenir Madame X... le 14 mars 2009 au plus tard ; qu'elle n'a pas respecté le délai de prévenance prévu par la loi puisqu'elle n'a avisé la salariée que le 14 avril ; que le paiement d'une indemnité compensatrice du délai de prévenance est inopérant quant au respect de cette obligation ; que la salariée a pu subir un préjudice de ce fait mais ne formule aucune demande de ce chef ; qu'il ne peut être fait reproche à l'employeur d'avoir rompu abusivement le contrat "de travail puisqu'il a clairement notifié à Madame X..., avant la fin de la période d'essai, qu'il mettait fin à ce contrat ; que l'utilisation du mot « préavis » dans l'attestation Assedic remplie par l'employeur est inadéquate mais ce dernier souligne ajuste titre qu'il n'a fait que renseigner une rubrique imprimée qui ne prévoit pas de délai de prévenance ; que cette mention ne permet aucunement de douter quant à la volonté de l'employeur qui a expressément notifié à la salariée que son activité se terminait le 14 avril au soir et qui, à cette date, lui a délivré un reçu de solde de tout compte et un certificat de travail pour la période du 15 octobre 2008 au 14 avril 2004 ; qu'en conséquence, les demandes formées par Madame X... au titre de la rupture abusive du contrat de travail seront rejetées.

ALORS QUE la période d'essai ne peut être prolongée du fait de la durée du délai de prévenance ; que la période couverte par le délai de prévenance et postérieure au terme de la période d'essai ne peut s'analyser en une période d'essai ; que la rupture du contrat survenu dans ces conditions s'analyse dès lors incontestablement en un licenciement de droit commun et non en une rupture de période d'essai ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L. 1221-25 du Code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR limité à 2.128,14 euros et 212,81 euros les sommes dues à Madame Sarah X... respectivement à titre de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents.

AUX MOTIFS QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que Madame X... produit une attestation qui n'est pas accompagnée d'une pièce d'identité de son auteur de sorte que la cour ne peut vérifier cette identité : cette attestation ne peut donc être retenue ; qu'elle verse en outre au dossier une vingtaine de courriels qu'elle a envoyés ou reçus, par exemple le 19 novembre 2008 à 9h38, le 26 novembre à 9h26, le 2 décembre à 9h37, le 4 février 2009 à 20h02, le 19 février à 10h54 et 20h30 26 février 2009 à 19h54 , le 4 mars 2009 à 16h15, 20h15 ou 21h56, le 9 mars à 21h14 et en conclut qu'elle arrivait sur son lieu de travail 15 minutes avant ses premiers courriels, soit entre 8h30 et 9h et ne le quittait pas avant 20 heures ; qu'il est à noter que seuls les courriels du 19 février et 4 mars ont été émis ou reçus le matin et le soir de la même journée ; qu'elle produit par ailleurs des feuilles de temps informatique, établie quotidiennement, pour les périodes du 8 au 14 décembre 2008 et du 2 mars 2009 au 12 avril 2009 dont il résulte que durant les semaines concernées elle a travaillé de 43 à 56 heures alors qu'elle était rémunérée sur la base de 35 heures ; que l'employeur souligne que Madame X... parle elle-même d'amplitude travail et non d'horaires effectifs, qu'il figure sur ses bulletins de salaire des journées de RTT et qu'elle a en conséquence été rémunérée pour toutes ses heures de travail, il ne fournit toutefois aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée ; que Madame X... fait le calcul suivant /amplitude horaire hebdomadaire : 55 heures dont il faut déduire 5 heures de temps de pause , 50-35ème 15 heures supplémentaires par semaine soit , sur la base d'un salaire horaire de 151,67 euros, avec majoration de 25 % pour les 8 premières heures et de 50 % pour les suivantes, 304,02 euros par semaine ; que la Cour retient ce calcul pour les sept semaines pour lesquelles Madame X... a étayé sa demande ; qu'il lui sera alloué en conséquence en paiement de ses heures supplémentaires la somme de 2128,14 euros, ainsi que celle de 212,81 euros au titre des congés payés afférents.

ALORS QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'en déboutant Madame Sarah X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires et congés payés y afférents quand, en présence de feuilles de temps informatiques établies quotidiennement et de courriers électroniques établissant l'existence de dépassements d'horaires, elle devait exiger de l'employeur qu'il lui fournisse les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, et former sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salariée, la Cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du Code du travail ;

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame Sarah X... de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

AUX MOTIFS QUE la demande au titre de travail dissimulé sera rejetée, l'élément intentionnel nécessaire à la constitution du délit n'étant pas établi.

ALORS QUE constitue le délit de travail dissimulé le fait pour l'employeur de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la mention sur le bulletin de paie d'un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué dont l'employeur a une parfaite connaissance caractérise l'élément intentionnel de l'infraction ; que la Cour d'appel, qui a constaté que l'employeur le nombre des heures de travail réellement effectué résultait de feuilles de temps informatiques établies quotidiennement, dont l'employeur était en conséquence en possession, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du Code du travail.

ET ALORS en tout cas QUE en excluant l'élément intentionnel sans préciser les raisons pour lesquelles l'employeur avait fait figurer sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des mêmes textes.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO00113
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