Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 22 juin 1993, 87-19.183, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 septembre 1987), qu'au cours de l'instance d'appel d'un jugement l'ayant condamnée à payer une certaine somme à la Banque commerciale privée (la BCP), la société d'exploitation des Serres Cuenot a été mise en redressement judiciaire ; que, pour ce motif, la cour d'appel, par un premier arrêt, a constaté la suspension de l'instance et a renvoyé l'affaire pour permettre à la BCP de justifier de la déclaration de sa créance ; que, le 16 décembre 1986, la BCP a effectué une déclaration auprès de M. X..., représentant des créanciers ; que celui-ci, mis en cause, a fait valoir la tardiveté de la déclaration, le jugement ouvrant la procédure collective ayant été publié au BODACC le 7 octobre 1986 ; que la BCP s'est alors prévalue d'une lettre recommandée contenant déclaration de sa créance, adressée par elle à M. Y..., administrateur du redressement judiciaire, le 18 septembre 1986, dans le délai de 15 jours fixé par l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 dans sa rédaction alors applicable ; que l'arrêt attaqué a dit que l'instance d'appel ne pouvait être considérée comme ayant été valablement reprise, faute par la BCP de justifier d'une déclaration de créance régulière ou du bénéfice d'un relevé de forclusion ;

Attendu que la BCP fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le représentant des créanciers et l'administrateur constituent deux organes de la procédure collective qui concourent ensemble au déroulement de celle-ci et notamment à la vérification des créances, à laquelle la présence de l'administrateur est exigée ; qu'il s'ensuit qu'une simple erreur d'orientation de la déclaration de créance, adressée par un créancier à l'administrateur au lieu de l'être au représentant des créanciers, ne peut avoir pour effet de rendre celle-ci inopérante ; qu'ainsi l'arrêt a violé les articles 10 et suivants 50, 101 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, qu'à supposer qu'une contestation soit possible, est incompétente pour trancher de la validité d'une déclaration de créance, la cour d'appel, saisie dans le cadre d'une action en paiement, antérieure à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, dont la seule compétence est de constater la créance et d'en fixer le montant ; qu'ainsi, en déclarant inopérante la déclaration effectuée à l'administrateur, l'arrêt a violé l'article 48 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte de l'article 48 de la loi du 25 janvier 1985 que, sous réserve des dispositions relatives aux instances prud'homales, les instances en cours à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire qui tendent à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent, sont suspendues jusqu'à la déclaration faite par le créancier poursuivant de sa créance, la suspension ainsi prévue devant être regardée comme constituant une interruption ; qu'elles sont alors reprises de plein droit, le représentant des créanciers et l'administrateur, s'il en a été désigné un, dûment appelés ; qu'il appartient à la juridiction saisie de vérifier la régularité de la reprise d'instance et, à cette fin, d'apprécier la validité de la déclaration de créance ;

Attendu, en second lieu, que l'article 50 de la loi du 25 janvier 1985 dispose qu'à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au représentant des créanciers ; que la cour d'appel en a exactement déduit que l'administrateur du redressement judiciaire, dont les fonctions sont distinctes de celles du représentant des créanciers, n'était pas habilité à recevoir une déclaration de créance, et que celle adressée par la BCP à M. Y..., administrateur, était inopérante ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

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