CAA de BORDEAUX, 6ème chambre - formation à 3, 01/04/2019, 17BX01404, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H...B...a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du président du conseil régional de La Réunion du 15 décembre 2014 portant modification de l'organigramme de la direction générale adjointe des routes (DGAR) et création de la direction des transports et des déplacements (DTD), d'annuler les arrêtés du 2 juin 2015, du 18 juin 2015 et n° 2016/0550 de mars 2016 par lesquels ont été précisées les modalités d'organisation de la DTD, d'annuler l'arrêté du 16 février 2015 portant désignation de M. G...en qualité de directeur de la DTD, d'annuler la décision du 1er août 2016 par laquelle M. F...a été affecté au poste de responsable du " pôle accompagnement et prospective " au sein de la DTD, d'enjoindre à la région Réunion de recréer l'ancien service transports et déplacements (STD) et de lui en confier la responsabilité, et de condamner la région Réunion à lui verser un euro symbolique en réparation du préjudice subi.

Par un jugement n° 1500213 du 2 mars 2017, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté la demande de M.B....


Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mai 2017, et régularisée le 9 septembre 2017, ainsi qu'un mémoire en réplique, enregistré le 25 juillet 2018, M.B..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500213 du tribunal administratif de La Réunion du 2 mars 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du président du conseil régional de La Réunion du 15 décembre 2014 portant modification de l'organigramme de la direction générale adjointe des routes (DGAR) et création de la direction des transports et des déplacements (DTD) ;

3°) d'annuler les arrêtés du 2 juin 2015, du 18 juin 2015 et n° 2016/0550 de mars 2016 par lesquels ont été précisées les modalités d'organisation de la DTD ;

4°) d'annuler l'arrêté du 16 février 2015 portant désignation de M. I...A...A...en qualité de directeur de la DTD ;

5°) d'annuler la décision du 1er août 2016 par laquelle M. D...F...a été affecté au poste de responsable du " pôle accompagnement et prospective " au sein de la DTD ;

6°) d'enjoindre à la région Réunion de recréer l'ancien service transports et déplacements (STD) et de lui en confier la responsabilité ;

7°) de condamner la région Réunion à lui verser un euro symbolique en réparation du préjudice subi ;

8°) de mettre à la charge de la région Réunion la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- l'arrêté du 15 décembre 2014 n'est pas une simple mesure d'ordre intérieur, car elle permet de pérenniser sa situation de mise au placard ; cette réorganisation a abouti à son total sous-emploi, donc elle constitue bien une atteinte à ses droits ; cette réorganisation conduit en effet à une baisse sensible de ses responsabilités ; il est en situation de désoeuvrement total et de mise à l'écart, signes de harcèlement moral son encontre ; par suite, cet arrêté lui fait grief, ainsi que tous les arrêtés individuels pris en application de celui-ci, par lesquels ont été précisé les modalités d'organisation de la DTD ;
- la nomination de M. G...au poste de directeur de la DTD est illégale ; sa nomination était décidée avant même la réorganisation des services ; la décision de nomination le concernant n'est adossée à aucune décision de l'assemblée plénière validant la création de la DTD ou validant la création d'un poste de directeur ; la vacance d'emploi devait être publiée au niveau national et non au seul niveau local ; cette nomination est donc entachée de détournement de pouvoir ;
- la nomination de M. F...doit donc également être annulée, puisqu'elle est la conséquence directe de la décision de réorganisation du service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2018, la région Réunion, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés ; la réorganisation des services est bien une mesure d'ordre intérieur et n'est aucunement le signe d'un harcèlement moral envers l'intéressé, dont les responsabilités n'ont pas été réduites, bien au contraire.


Par une ordonnance en date du 18 juin 2018, la clôture de l'instruction a été reportée au 16 août 2018.


Par une décision du 8 juin 2017 le bureau d'aide juridictionnelle a rejeté la demande d'aide juridictionnelle formée par M.B....


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,
- et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.



Considérant ce qui suit :


1. Par un arrêté du 15 décembre 2014, le président du conseil régional de La Réunion a modifié l'organigramme de la direction générale adjointe des routes (DGAR) en créé en son sein une direction des transports et des déplacements (DTD). Par des arrêtés n° 2015/1635 du 2 juin 2015, n° 2015/1893 du 18 juin 2015 et n° 2016/0550 de mars 2016, les modalités d'organisation de la nouvelle DTD ont été précisées. Par ailleurs, par un arrêté en date du 16 février 2015, la même autorité a désigné M.G..., ingénieur territorial en chef de classe normale, pour assurer les fonctions de directeur des transports et des déplacements. Enfin, le président du conseil régional a, le 1er août 2016, pris une décision d'affectation en faveur de M.F..., désigné comme responsable du " pôle accompagnement et prospective au sein de la DTD. M.B..., ingénieur territorial initialement affecté au service transports et déplacements (STD) et désormais affecté à la DTD, demande l'annulation de l'ensemble de ces décisions et fait appel du jugement n° 1500213 du tribunal administratif de La Réunion du 2 mars 2017, qui a rejeté sa demande en ce sens.


Sur les conclusions dirigées contre les mesures de réorganisation :

2. Les mesures prises à l'égard d'agents publics qui, compte tenu de leurs effets, ne peuvent être regardées comme leur faisant grief, constituent de simples mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours. Il en va ainsi des mesures qui, tout en modifiant leur affectation ou les tâches qu'ils ont à accomplir, ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives qu'ils tiennent de leur statut ou à l'exercice de leurs droits et libertés fondamentaux, y compris si le changement d'affectation a été pris pour des motifs tenant au comportement de l'agent. Il en va différemment si les changements d'affectation emportent perte de responsabilités ou de rémunération ou traduisent une discrimination.


3. Au regard des éléments figurant au dossier, sur les attributions et les conditions de travail de M. B...découlant de la nouvelle organisation, ainsi que sur sa situation antérieure au STD, où il n'exerçait pas de fonctions d'encadrement significatives, les mesures contestées n'entraînent pour lui ni perte de rémunération, ni diminution de ses responsabilités, alors en outre que la région fait valoir que de nouvelles missions lui ont été confiées. Elles n'ont pas non plus été de nature à porter atteinte aux droits statutaires que M. B...tient de sa qualité d'ingénieur territorial, ni à ses droits ou libertés fondamentaux. Elles ne traduisent pas une discrimination ou une manifestation de harcèlement moral à son encontre et ne constituent pas une sanction déguisée. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que les arrêtés successifs concernant la création et l'organisation de la DTD présentaient le caractère de mesures d'ordre intérieur insusceptibles de recours et que, sur ce point, la requête de M. B...devait être regardée comme irrecevable.


Sur les conclusions dirigées contre les décisions individuelles :

4. Aux termes de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 : " (...) Toute nomination ou toute promotion dans un grade qui n'intervient pas exclusivement en vue de pourvoir à un emploi vacant et de permettre à son bénéficiaire d'exercer les fonctions correspondantes est nulle (...) ".


5. En premier lieu, contrairement à ce que fait valoir M.B..., qui s'était porté candidat pour le poste nouvellement créé de directeur des transports et des déplacements au vu de l'avis de vacance de poste publié le 22 décembre 2014, poste auquel a été nommé M. G... par un arrêté du 16 février 2015, les pièces du dossier établissent que la désignation de ce dernier a été décidée en vue d'un exercice effectif des nouvelles fonctions de DTD issues de la réorganisation des services mise en oeuvre par l'arrêté précité du 15 décembre 2014 et qu'elle ne saurait être regardée comme constitutive d'une nomination pour ordre. Si M. B...soutient également que cette nomination est entachée de détournement de pouvoir et d'erreur manifeste d'appréciation, ses moyens ne sont pas étayés des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. Par suite, le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 16 février 2015 relatif à la nomination de M. G....
6. En second lieu, s'agissant de la décision d'affectation de M. F...au poste de responsable du " pôle accompagnement et prospective " en date du 1er août 2016, M. B...n'en demande l'annulation qu'en conséquence de l'illégalité des autres décisions contestées. Dans ces conditions, ses conclusions en annulation dirigées contre cette décision d'affectation ne peuvent qu'être rejetées.


Sur les autres conclusions de la requête :

7. D'une part, le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation présentées par M.B..., ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies. D'autre part, en l'absence d'illégalité fautive commise par la région Réunion et donc de préjudice, les conclusions indemnitaires présentées par M.B..., qu'il chiffre à un euro symbolique, doivent, en tout état de cause, être rejetées.


8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.


Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties présentées sur ce fondement.









DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...et les conclusions présentées par la région Réunion au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. H...B...et à la région Réunion.
Délibéré après l'audience du 18 mars 2019 à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Pierre Bentolila, président-assesseur,
Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er avril 2019.

Le rapporteur,
Florence Rey-GabriacLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 17BX01404



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