Conseil d'État, , 11/09/2018, 423898, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 5 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat du retrait et du traitement de l'amiante et des autres polluants demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 2 juillet 2018 définissant les critères de certification des opérateurs de diagnostic technique et des organismes de formation et d'accréditation des organismes de certification ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Il soutient que :
- la condition d'urgence est remplie dès lors que l'arrêté contesté, qui entre en vigueur le 1er octobre 2018, porte une atteinte grave et immédiate à la situation des opérateurs et à l'objectif à valeur constitutionnelle de protection de la santé publique et au respect des droits du travailleur ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté contesté ;
- il est entaché d'incompétence dès lors que, d'une part, les auteurs de cet arrêté ne disposaient pas de la délégation de compétences nécessaire pour édicter un tel acte et, d'autre part, fait défaut la signature de la ministre du travail ;
- il a été pris au terme d'une procédure irrégulière dès lors que son adoption n'a pas été précédée de la consultation du Conseil d'orientation des conditions de travail ;
- il est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il introduit une différence de traitement injustifiée du niveau de certification exigé pour les repérages d'amiante en méconnaissance du principe d'égalité devant la loi ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que des repérages amiante avant travaux peuvent être réalisés par des personnes certifiées " sans mention " en méconnaissant l'objectif de protection de la santé et de professionnalisation des opérateurs de diagnostic et de repérage.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative ;




1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ; qu'il résulte de ces dispositions que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi d'une demande tendant à la suspension d'une telle décision, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de celle-ci sur la situation de ce dernier ou, le cas échéant, des personnes concernées, sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; qu'aux termes de l'article L. 522-3 du code de justice administrative " Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée (...) " ;

2. Considérant que les articles L. 271-6 et R. 271-1 du code de la construction et de l'habitation prévoient l'établissement, particulièrement en cas de vente d'un immeuble, de diagnostics techniques dans différents domaines et fixent les principes et les règles auxquels doivent satisfaire les personnes établissant de tels diagnostics et les organismes de certification des compétences de celles-ci ; que l'article R. 271-1 du code de la construction et de l'habitation renvoie à des arrêtés interministériels le soin de préciser ces règles ; qu'un arrêté du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, du ministre de la cohésion des territoires, de la ministre des solidarités et de la santé et du ministre de l'économie et des finances du 2 juillet 2018 a ainsi fixé les critères de certification des opérateurs de diagnostic technique et des organismes de formation et d'accréditation des organismes de certification dans les domaines du plomb, de l'amiante, des termites, du gaz, de l'énergie et de l'électricité ; que le Syndicat du retrait et du traitement de l'amiante et des autres polluants demande la suspension de ces dispositions ;

3. Considérant que pour soutenir qu'il y a urgence à suspendre l'arrêté litigieux, le requérant met en avant son entrée en vigueur a brève échéance, le 1er octobre 2018, et la distinction qu'il opère pour certains domaines, dont l'amiante, entre deux niveaux de certification, avec ou sans mention, le certificat " sans mention " pour les repérages d'amiante portant notamment sur des immeubles hébergeant 300 travailleurs ou moins, ce qui aurait pour conséquence une moindre protection tant des usagers des immeubles que des personnes chargées des diagnostics ; que cette affirmation générale n'est toutefois assortie d'aucune précision de nature à l'étayer ; qu'au demeurant, ainsi que le relève la requête, l'arrêté litigieux abroge un précédent arrêté du 25 juillet 2016 ayant le même objet qui, dans le domaine de l'amiante, avait d'ores et déjà instauré un double certificat en retenant les mêmes critères ; que, dans ces conditions, l'urgence requise par les dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas établie ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête du Syndicat du retrait et du traitement de l'amiante et des autres polluants doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de Syndicat du retrait et du traitement de l'amiante et des autres polluants est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au Syndicat du retrait et du traitement de l'amiante et des autres polluants.
Copie en sera adressée pour information au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.


ECLI:FR:CEORD:2018:423898.20180911
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