CAA de BORDEAUX, 5ème chambre - formation à 3, 17/10/2017, 15BX01693, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La fédération des sociétés pour l'étude, la protection et l'aménagement de la nature dans le sud-ouest section Gironde (SEPANSO Gironde), d'une part, l'association Vive la forêt, d'autre part, ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le permis de construire un parc photovoltaïque au lieu-dit " Lampragne " à Naujac-sur-Mer délivré le 14 janvier 2013 par le préfet de la Gironde à la société Naujac Energie Solaire.

Par un jugement n°1302427 et 1302482 du 7 mai 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé ce permis de construire.

Procédure devant la cour :

Par une requête et une requête rectificative enregistrées respectivement les 20 mai 2015 et 2 juin 2015, et un mémoire enregistré le 31 janvier 2017, la société Naujac Energie Solaire, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 mai 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la SEPANSO Gironde et l'association Vive la forêt devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de la SEPANSO Gironde et de l'association Vive la forêt une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier, la copie qui lui en a été notifiée ne permettant pas de s'assurer que les prétentions des parties ont été correctement synthétisées ;
- les dispositions de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme dont le tribunal a retenu la méconnaissance, ne s'appliquent pas à un parc photovoltaïque qui ne constitue pas une urbanisation au sens de ces dispositions ;
- le projet est situé en continuité avec l'urbanisation en raison de sa localisation en continuité immédiate des hameaux de Vignolles et de l'impasse du Cerf qui confèrent un caractère urbanisé au secteur ;
- le projet n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 414-4 du code de l'environnement.


Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2016, l'association Vive la forêt et la SEPANSO Gironde, représentées par MeB..., concluent au rejet de la requête comme non fondée et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Naujac Energie Solaire au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Par un mémoire, enregistré le 31 janvier 2017, la société Naujac Energie Solaire a demandé à la cour de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme au principe d'égalité devant la loi.

Par une ordonnance du 15 mai 2017, le président de la 5ème chambre de la cour a rejeté cette demande.


Par ordonnance du 7 mars 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 10 avril 2017 à 12h00.


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.


Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Christine Mège,
- les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant l'association Vive la forêt et la SEPANSO Gironde.



Considérant ce qui suit :

1. La société Naujac Energie Solaire, à laquelle le préfet de la Gironde a délivré le 14 janvier 2013 un permis de construire un parc photovoltaïque au lieu-dit " Lampragne " à Naujac-sur-Mer, relève appel du jugement n° 1302427 et1302482 du 7 mai 2015 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux, sur demande de la SEPANSO Gironde et de l'association Vive la forêt, a annulé ce permis.

Sur la régularité du jugement :

2. Si l'expédition du jugement n° 1302427 et1302482 du 7 mai 2015 adressée à la société Naujac Energie Solaire ne contient pas l'analyse des moyens soulevés par les parties, la minute de la même décision, dont il lui appartenait de demander copie, la comporte. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement est irrégulier.

Sur la légalité du permis de construire :

3. Aux termes de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : " I - L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. / Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, les constructions ou installations liées aux activités agricoles ou forestières qui sont incompatibles avec le voisinage des zones habitées peuvent être autorisées, en dehors des espaces proches du rivage, avec l'accord du préfet après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Cet accord est refusé si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages. (. .. ) ".

4. Il résulte des dispositions des articles L. 146-4 et suivants du code de l'urbanisme que le législateur a entendu interdire toute construction isolée dans les communes littorales et a limitativement énuméré les dérogations à cette règle. Ainsi, l'implantation de panneaux photovoltaïques, qui doit être regardée comme une extension de l'urbanisation au sens du I de l'article L. 146-4, ne peut, dès lors que ces panneaux ne constituent ni une construction ou une installation liée aux activités agricoles ou forestières, ni une construction ou une installation prévue par l'article L. 146-8 du même code, et en l'absence, en tout état de cause, de délimitation par le document local d'urbanisme d'une zone destinée à accueillir un hameau nouveau, être autorisée que si elle est située en continuité avec une agglomération ou un village existant.

5. Il est constant que le parc photovoltaïque est implanté à 1,5 kilomètre du bourg de Naujac-sur-Mer. Il ressort des pièces du dossier que les constructions formant le hameau des Vignolles sont en trop petit nombre pour être regardées comme constituant un village au sens des dispositions précitées. La société ne peut utilement se prévaloir d'une continuité avec l'impasse du Cerf, dont la localisation n'est pas même précisée. Dès lors, le projet de la société Naujac Energie Solaire n'est pas situé en continuité d'une agglomération ou d'un village existant. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le parc soit situé dans une zone délimitée par le document local d'urbanisme comme destinée à accueillir un hameau nouveau. Par suite, le permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions du I de l'article L. 16-4 du code de l'urbanisme.

6. Il résulte de ce qui précède que la société Naujac Energie Solaire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le permis de construire du 14 janvier 2013. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. En revanche, il y a lieu de mettre à sa charge une somme 500 euros à verser, d'une part, à la SEPANSO Gironde, d'autre part, à l'association Vive la forêt.



DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Naujac Energie Solaire est rejetée.
Article 2 : La société Naujac Energie Solaire versera à la SEPANSO Gironde et à l'association Vive la forêt la somme de 500 euros chacune en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Naujac Energie Solaire, au ministre de la cohésion des territoires, à la SEPANSO Gironde, à l'association Vive la forêt et à la commune de Naujac-sur-Mer.
Délibéré après l'audience du 19 septembre 2017 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, président,
Mme Christine Mège, président-assesseur,
M. Frédéric Faïck, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 octobre 2017.

Le rapporteur,
Christine Mège
Le président,
Elisabeth Jayat
Le greffier,
Evelyne Gay-Boissières
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 15BX01693



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