Cour administrative d'appel de Douai, 3e chambre - formation à 3, 22/07/2016, 13DA01723, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 18 octobre 2012 de la commission départementale des droits et de l'autonomie du Pas-de-Calais refusant de lui reconnaître la qualité de travailleur handicapé et de prononcer une orientation professionnelle, ensemble la décision du 20 décembre 2012 rejetant son recours gracieux.
Par une ordonnance n° 1300464 du 2 avril 2013, le vice-président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 octobre 2013, M. E..., représenté par Me B... F... demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 avril 2013 du vice-président du tribunal administratif de Lille ;

2°) d'annuler ces décisions ;



3°) de lui reconnaître la qualité de travailleur handicapé et de faire droit à sa demande d'orientation professionnelle ;

4°) de mettre à la charge du département du Pas-de-Calais la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions lui refusant la qualité de travailleur handicapé sont insuffisamment motivées ;
- il remplit les critères pour se voir reconnaître la qualité de travailleur handicapé ;
- il doit pour ce faire bénéficier d'une orientation professionnelle.
Une mise en demeure a été adressée le 13 février 2014 au département du Pas-de-Calais et l'avis de réception de celle-ci.
Par un arrêt avant dire-droit du 19 février 2015, la cour avant de statuer sur la requête de M.E..., tendant à l'annulation de l'ordonnance du 2 avril 2013 du vice-président du tribunal administratif de Lille a ordonné une expertise afin d'apprécier si la gravité de l'état de santé du requérant lui permet d'occuper un emploi adapté à l'altération de ses capacités physiques.
La procédure a été communiquée à l'association départementale d'actions éducatives, en qualité de tuteur de M.E....

L'association départementale d'actions éducatives, représentant M.E..., a été admise à l'aide juridictionnelle totale par décision du 20 juin 2016.
Vu :
- le rapport d'expertise enregistré le 9 juin 2015,
- l'ordonnance de taxation du 20 juillet 2015 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.


Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public.






1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5213-1 du code du travail : " Est considérée comme travailleur handicapé toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique " ; qu'aux termes de l'article L. 5213-2 du même code : " La qualité de travailleur handicapé est reconnue par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles : " Une commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées prend, sur la base de l'évaluation réalisée par l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article L. 146-8, des souhaits exprimés par la personne handicapée ou son représentant légal dans son projet de vie et du plan de compensation proposé dans les conditions prévues aux articles L. 114-1 et L. 146-8, les décisions relatives à l'ensemble des droits de cette personne, notamment en matière d'attribution de prestations et d'orientation, conformément aux dispositions des articles L. 241-5 à L. 241-11 " ; qu'aux termes du I de l'article L. 241-6 du même code : " La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées est compétente pour : (...) 4º Reconnaître, s'il y a lieu, la qualité de travailleur handicapé aux personnes répondant aux conditions définies par l'article L. 323-10 [devenu article L. 5213-1] du code du travail (...) " ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du code du travail que la qualité de travailleur handicapé doit être appréciée en tenant compte, d'une part, de l'état de santé du demandeur et, d'autre part, de ses qualifications et de l'emploi qu'il occupe ou de celui qu'il aurait vocation à occuper ;

3. Considérant, par ailleurs, que les recours formés contre les décisions des commissions des droits et de l'autonomie des personnes handicapées statuant, en application des dispositions du 4° du I de l'article L. 241-6 du code de l'action sociale et des familles, sur une demande de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail, constituent des recours de plein contentieux ; qu'eu égard à son office lorsqu'il est saisi d'un tel recours, il appartient au juge administratif de se prononcer non sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais seulement sur la qualité de travailleur handicapé de la personne intéressée, en se plaçant à la date à laquelle il rend sa décision ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.E..., né en 1961 et qui exerçait le métier de chauffeur poids-lourd, a été victime en 2001 d'un accident sur son lieu de travail entraînant des séquelles physiques ; que par des décisions du 18 octobre 2012, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du Pas-de-Calais a refusé, de lui reconnaître la qualité de travailleur handicapé et de prononcer une orientation professionnelle au motif " qu'il relevait de soins " ; que par des décisions du 20 décembre 2012, la commission a confirmé ses refus au motif que ses capacités ne lui permettaient pas d'obtenir ou de conserver un emploi ; qu'il résulte des constats du rapport d'expertise, non contesté, que si M. E...ne présente pas de pathologie clinique pouvant l'empêcher d'avoir une activité professionnelle, il souffre en revanche d'une pathologie psychotique pour laquelle il ne suit pas de traitement régulier ; que son état mental actuel fait ainsi obstacle à ce qu'il puisse être orienté vers une recherche directe d'emploi ou relever d'un établissement ou d'un service d'aide par le travail ; qu'il résulte d'ailleurs de l'instruction que M. E...a été mis sous tutelle par une décison du 25 avril 2016 du juge des tutelles du tribunal d'instance de Saint-Omer ; que, par suite, M. E... n'établit pas que la qualité de travailleur handicapé doit lui être reconnue, ni qu'il peut faire l'objet d'une orientation professionnelle ;



5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;


Sur les dépens :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise (...) / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. / L'Etat peut être condamné aux dépens " ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre le montant des frais de l'expertise diligentée devant la cour administrative d'appel de Douai, liquidés et taxés à la somme de 600 euros par ordonnance du 20 juillet 2015 du président de la Cour pour moitié à la charge de M. E...et pour moitié à la charge de la maison départementale des personnes handicapées du Pas-de-Calais ;



DÉCIDE :


Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.



Article 2 : Les frais d'expertise d'un montant de 600 euros sont mis pour moitié à la charge de M. E... et pour l'autre moitié à la charge du département du Pas-de-Calais.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E..., au département du Pas-de-Calais, à la maison départementale des personnes handicapées du Pas-de-Calais et à l'assocation départementale des actions éducatives.

Copie sera adressée à M. D...A..., expert.


Délibéré après l'audience publique du 7 juillet 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Lu en audience publique le 22 juillet 2016.


Le rapporteur,
Signé : O. NIZETLe président de chambre,
Signé : P-L. ALBERTINILe greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.


Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot


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