Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 juin 2014, 13-16.236, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué statuant en dernier ressort, que salarié de la société Superba et par ailleurs en charge de plusieurs mandats syndicaux, M. X...a bénéficié d'un détachement dans le cadre d'un accord tripartite régularisé le 17 février 1995 entre l'employeur, le syndicat URI (Union régionale interprofessionnelle) CFDT Alsace (l'URI) et lui-même ; qu'un second accord tripartite a été signé le 21 juin 1995 entre l'URI, le syndicat CFDT-métaux du Haut-Rhin et le salarié élu comme responsable de la section juridique CFDT et considéré comme un permanent à mi-temps ; que par suite de la dénonciation par la société Superba de ce détachement, un nouveau contrat de travail a été conclu le 15 janvier 2007 entre elle et le salarié sur la base d'un temps partiel ; que reprochant à l'URI une dégradation de ses conditions de travail, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande initiale en résiliation transformée en prise d'acte et de diverses demandes en paiement ; que le syndicat CFDT-métaux du Haut-Rhin s'est joint à cette action ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'URI :

Vu l'article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ;

Attendu que pour dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le jugement après avoir constaté que les déplacements du salarié devaient être préalablement décidés par l'URI énonce notamment que « le Conseil de céans se doit de constater qu'une telle décision jette un froid dans les relations contractuelles, avec un militant qui se retrouve sur la sellette, alors qu'il n'avait jamais démérité » ; que s'agissant du retrait invoqué de ses responsabilités par le salarié le conseil indique « Pour le Conseil de céans, l'estocade finale de l'URI a eu lieu en 2009, lorsque cette dernière a supprimé la cellule de formation syndicale, avec comme dans une arène, la mise à mort irrémédiablement de M. X..., qui n'était plus que l'ombre de lui-même », ajoutant plus loin « En fait de par sa notoriété, M. X...devenait un élément gênant, donc à éliminer, avec sa cellule de formation », puis « En agissant de la sorte, le Conseil de céans est persuadé que Mme Y...se doutait que M. X...s'en trouverait affecté, offensé, voire déprimé et par la suite dépressif. Il y a un adage qui dit, il faut diviser pour régner », puis encore « En fait, ce différend fait penser à l'adage : « le pot de fer contre le pot de terre », ou encore David contre Goliath », et « l'URI a ainsi agi comme un véritable rouleau compresseur et malheureusement M. X...s'est retrouvé sur son passage, impuissant et à sa merci ».
Qu'en statuant ainsi en des termes incompatibles avec l'exigence d'impartialité, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens des pourvois :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 21 février 2013, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Strasbourg ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Colmar ;
Condamne M. X...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt.
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par Me Haas, avocat aux Conseils, pour l'URI CFDT Alsace.
PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR dit que la prise d'acte produisait les effets d'une rupture abusive, D'AVOIR dit que l'URI CFDT n'a pas respecté certaines de ses obligations, notamment par le non-respect de l'accord tripartite du 21 juin 1995, ni par la suite les conditions de travail définies par le contrat du 15 mars 2007, D'AVOIR dit que l'URI CFDT, par les conditions de travail et l'organisation du travail qu'elle a imposées à M. X..., a provoqué une détérioration de son état de santé une atteinte grave à sa dignité, D'AVOIR dit que l'ensemble de ces faits et circonstances engage la responsabilité de l'URI et justifie les demandes de dommages-intérêts pour M. X...au titre de l'article 1382 du code civil et, en conséquence, de L'AVOIR condamné à payer à M. X...la somme de 1 euro à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE pour le conseil de céans, ce dossier a un caractère atypique, car une organisation syndicale entretenait avec M. X...une relation de travail ; de plus un accord tripartite a été signé le 17 février 1995, sous le titre « accord de détachement d'un salarié protégé », point non négligeable ; que pour M. X..., le non-respect des conditions de travail contractuellement définies ont amené ce dernier à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, ayant les effets d'un licenciement abusif ; que dans la présente instance les deux parties s'opposent sur la prééminence des contrats triangulaires passés ; que pour le demandeur, c'est le mandat politique qui encadre l'exécution des relations de travail du militant, tandis que pour le défendeur, c'est le contrat de travail et le pouvoir de direction de l'employeur qui doivent l'appliquer ; qu'en conséquence, et pour mieux cerner ce litige où le contrat de travail d'un responsable syndical s'incorpore dans cette relation de travail spécifique, le conseil de céans a jugé utile d'apporter des précisions sur le syndicalisme, ainsi que les valeurs de la CFDT ; que, sur le syndicalisme : que l'objectif premier d'un syndicat est avant tout de défendre les salariés dans les entreprises et donc pour ce faire ce syndicalisme doit être solidement implanté sur les lieux de travail ; que fidèle aux traditions du mouvement ouvrier français, la CFDT est omni présente pour protéger le salarié lors de l'embauche, de l'exécution du contrat et de la rupture du contrat de travail ; que de plus, c'est l'implantation sur le lieu de travail qui conditionne la représentativité pour négocier les différents accords dans l'ensemble des entreprises ; qu'en fait, le mouvement syndical, au sein du mouvement ouvrier est « apolitique » ; qu'en réalité les personnes qui adhérent à la CFDT le font librement par un « contrat d'adhésion » à ses principes et valeurs ; que ce sont ces personnes qui vont négocier, par la suite dans leurs entreprises respectives et participer aux différentes décisions prises dans l'entreprise ; que dans un monde en évolution, les travailleurs est de plus en plus menacé ; que le syndicalisme est donc un instrument nécessaire pour les travailleurs, face aux pouvoirs de directions des employeurs ; que ces quelques précisions étaient nécessaires pour le conseil de céans, car M. X...était à la fois délégué du personnel, délégué syndical, défenseur syndical, conseiller prud'homal et affecté à l'URI comme responsable du secteur juridique : que, sur la prise d'acte de la rupture, suite aux dispositions de l'article L. 1231-1 du code du travail qui stipule que : « le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre ¿ » ; que dans le cas présent, c'est le salarié de l'URI, M. X..., qui est en droit de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, à condition que l'employeur ait commis un manquement d'une gravité suffisante à ses obligations contractuelles ; qu'il n'est peut être pas utile de rappeler que la prise d'acte de la rupture doit être concomitante et contemporaine aux faits ainsi dénoncés ; que M. X...avait comme fonction, la responsabilité du secteur juridique de la CFDT Alsace, et qu'à cet effet, disposait d'un crédit d'heures pour assumer sa mission, et que suite à la première convention tripartite signée le 17 février 1995, les relations contractuelles étaient au beau fixe jusqu'en 2007, où la société décida de dénoncer cet accord ; que le contrat de travail régularisé le 15 mars 2007 énonce que la qualification de M. X...est celle de chargé de missions ; que cependant, progressivement les conditions de l'activité de M. X...furent modifiées par la direction de l'URI, d'abord par l'intermédiaire de M. Bernard Z...et par la suite par Mme Sabine Y...; que le conseil de céans va donc analyser les griefs exposés par M. X...pour justifier la prise d'acte de la rupture ; Suppression de la responsabilité de la gestion du compte du secteur juridique : Que pour ce grief, rien de spécial à rajouter pour le conseil de céans sinon que du jour au lendemain M. X...ne pourra plus émettre de chèques, ni utiliser la carte bancaire ; et que d'ajouter que le non-respect de cette interdiction entrainera un dépôt de plainte pour escroquerie ; que le conseil de céans se doit d'admettre que de tels propos sont particulièrement offensants à l'égard d'un militant de longue date n'ayant jamais démérité ; Remise en cause des engagements pris lors du contrat triangulaire du 21 juin 1995 : que M. X..., de par son mandat était contraint d'entreprendre de nombreux déplacements ; que depuis 1995, les frais de déplacement et de repas dans le cadre du secteur juridique étaient remboursés, rubis sur l'ongle, sans problème sur simple présentation des pièces justificatives ; que dorénavant la direction de l'URI impose que le déplacement doit avoir été décidé préalablement par la direction de l'URI, faute de quoi les frais ne sont pas pris en charge ; qu'une fois encore, le conseil de céans se doit de constater qu'une telle décision jette un froid dans les relations contractuelles, avec un militant qui se retrouve sur la sellette, alors qu'il n'avait jamais démérité ; Suppression de la responsabilité de la formation syndicale juridique : que M. X...perd progressivement son rôle prépondérant de responsable juridique au bénéfice de Mme Y..., et surtout différentes missions lui sont retirées telles que participer à l'élaboration, la préparation et l'animation de la politique juridique, préparer et animer les réunions du secteur juridique, proposer un plan de formation juridique aux responsables de la formation syndicale, participer à la préparation et à l'animation des formations syndicales, inscrites au plan de formation annuel ; que de plus, la direction de l'URI, en la personne de Mme Y..., se réservait de porter son veto sur toutes les initiatives prises par M. X...; que bien entendu, une telle décision a jeté un froid entre les différents intervenants ainsi que l'ensemble des stagiaires, comme le conseil de céans a pu le constater à la lecture de nombreuses attestations versées au dossier ; Retrait de nombreuses autres responsabilités : que M. X...se retrouve donc seul, mis à l'écart, et M. Z...et par la suite Mme Y...lui font expressément comprendre que le seul responsable politique du secteur juridique n'est plus M. X...; que pour le conseil de céans, l'estocade finale de l'URI a eu lieu en 2009, lorsque cette dernière a supprimé la cellule de formation syndicale, avec comme dans une arène, la mise à mort irrémédiablement de M. X...qui n'était plus que l'ombre de lui-même ; qu'une fois encore le conseil de céans a pu le constater à la lecture de nombreuses attestations versées au dossier ; que cependant, pour le conseil de céans, ce litige est avant tout un conflit de personnes, entre M. X...et Mme Y..., que d'un côté, M. X...qui exerce ses fonctions de responsable du secteur juridique de la CFDT Alsace avec la cellule de formation, qui devenait une personne incontournable pour les stages suivis par des défenseurs syndicaux, et essentiellement par des conseillers prud'homaux venus des quatre coins de l'Alsace ; que la réussite de ses stages de formations est d'ailleurs reconnue et félicitée par les attestations de Mme C..., avocate et Mme A..., responsable de la formation juridique des conseillers prud'homaux CFDT pour la période de 1997 à 2003 au sein de l'ISEFOJ, institut agréé par le ministère ; qu'une fois encore, le conseil de céans a pu constater la motivation et les résultats satisfaisants enregistrés par M. X..., à la lecture de nombreuses attestations versées au dossier ; que même l'URI, partie défenderesse reconnaît dans ses conclusions, l'entière confiance faite à M. X..., juqu'en 2007 ; qu'en fait, de par sa notoriété, M. X...devenait un élément gênant, donc à éliminer, avec sa cellule de formation ; que de l'autre côté, Mme Y..., secrétaire régionale de l'URI CFDT Alsace qui a succédé à M. Z..., suite au congrès d'octobre 2010 ; que cette dernière veut asseoir son autorité et comme elle l'a affirmé à la barre lors du bureau de jugement du 18 octobre 2012, s'est vue gratifiée d'un surnom, caporal ; que dans la foulée, Mme B...est nommée pour remplacer M. X...et devient ainsi la secrétaire régionale en charge de la politique juridique ; qu'en agissant de la sorte, le conseil de céans est persuadé que Mme Y...se doutait que M. X...se trouverait affecté, offensé, voire déprimé et par la suite dépressif ; qu'il y a un adage qui dit, il faut diviser pour régner ; que pour le conseil de céans, M. X...ne devait pas rentrer dans les plans de l'URI et comme il était un élément gênant, on lui a fait un certain nombre de reproches pour le déstabiliser encore davantage : difficultés pour établir la liste des défenseurs syndicaux, retards importants dans la transmission de la comptabilité du service juridique, suppression d'abonnements à des revues juridiques ; que c'est pourquoi, le conseil de céans, avait considéré que ce litige était avant tout un conflit de personnes, entre M. X...et Mme Y...; qu'en fait, ce différend fait penser à l'adage : « le pot de fer contre le pot de terre », ou encore David contre Goliath ; qu'en réalité, et dans le cas présent, c'est le pouvoir de direction de l'employeur contre un militant salarié ; que l'URI CFDT a ainsi agi comme un véritable rouleau compresseur et malheureusement, M. X...s'est retrouvé sur son passage, impuissant et à sa merci ; que deplus, la direction de l'URI ne peut pas ignorer que les difficultés rencontrées par M. X...ont altéré son état de santé ; Sur le harcèlement : M. X...n'a jamais voulu parler de harcèlement moral dans ses relations de travail avec la direction de l'URI mais il a l'impression de revenir quelques années en arrière quand il était à Superba et qu'au regard de l'ensemble des faits relatés, l'URI s'est servi de son pouvoir de direction pour déstabiliser M. X...qui en a souffert. Pour preuve, ses problèmes de santé qui font suite à un ensemble de faits qui par leur apparition s'apparente au harcèlement car dans les relations de travail on constate une atteinte aux conditions de travail, à la santé et à la sécurité du salarié ; sur les dommages-intérêts pour licenciement abusif : pour M. X..., le non-respect des conditions de travail contractuellement définies ont amené ce dernier à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, ayant les effets d'un licenciement abusif ; que dans la présente instance les deux parties s'opposent sur la prééminence des contrats triangulaires passés ; qu'en réalité et dans le cas qui nous intéresse, c'est le pouvoir de direction de l'employeur contre un militant salarié ; que l'URI CFDT a ainsi agi comme un véritable rouleau compresseur et malheureusement, M. X...s'est retrouvé sur son passage, impuissant et à sa merci ; que le conseil de céans regrette, par ailleurs, que l'URI CFDT n'ait pas tenu compte du passé de militant de M. X...ainsi que toutes les formations qu'il a préparées et animées, avec une collaboration étroite de la cellule de formation, qui du coup a été supprimée ; que son acharnement et ses actions de sape ont eu raison de l'état de santé et le moral de M. X...; que lors de l'audience de conciliation du 3 mars 2011, M. X...modifiait la qualification juridique de son action judiciaire en passant par une résiliation judiciaire à une prise d'acte de la rupture avec effet au 31 mars 2011 ; que pour éviter toute polémique, M. X...n'a pas souhaité « se faire du fric » à l'encontre de l'URI, mais voulait simplement que le conseil de céans le conforte dans ses droits, pour exécution déloyale du contrat de travail ; que de plus, pour justifier sa demande, M. X...s'est appuyé sur les dispositions de l'article 1382 du code civil ;
ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; qu'en motivant sa décision par des termes tels que : « une telle décision jette un froid dans les relations contractuelles, avec un militant qui se retrouve sur la sellette, alors qu'il n'avait jamais démérité », « En fait, de par sa notoriété, M. X...devenait un élément gênant, donc à éliminer », « il y a un adage qui dit, il faut diviser pour régner », « En fait, ce différend fait penser à l'adage : « le pot de fer contre le pot de terre », ou encore David contre Goliath », « L'URI CFDT a agi comme un véritable rouleau compresseur et malheureusement M. X...s'est retrouvé sur son passage, impuissant et à sa merci », « Le conseil de céans regrette, par ailleurs, que l'URI CFDT, n'a pas tenu compte du passé de militant de M. X...», qui, pris dans leur ensemble, manifestent un parti pris du juge en faveur du salarié, le conseil de prud'hommes, qui a statué en des termes manifestement incompatibles avec l'exigence d'impartialité, a violé l'article 6. 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR jugé que la prise d'acte produisait les effets d'une rupture abusive et condamné l'URI CFDT à payer à M. X...la somme de 1 ¿ à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE suite aux dispositions de l'article L. 1231-1 du code du travail qui stipule que : « le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre ¿ » ; que dans le cas présent, c'est le salarié de l'URI, M. X..., qui est en droit de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, à condition que l'employeur ait commis un manquement d'une gravité suffisante à ses obligations contractuelles ; qu'il n'est peut être pas utile de rappeler que la prise d'acte de la rupture doit être concomitante et contemporaine aux faits ainsi dénoncés ; que M. X...avait comme fonction, la responsabilité du secteur juridique de la CFDT Alsace, et qu'à cet effet, disposait d'un crédit d'heures pour assumer sa mission, et que suite à la première convention tripartite signée le 17 février 1995, les relations contractuelles étaient au beau fixe jusqu'en 2007, où la société décida de dénoncer cet accord ; que le contrat de travail régularisé le 15 mars 2007 énonce que la qualification de M. X...est celle de chargé de missions ; que cependant, progressivement les conditions de l'activité de M. X...furent modifiées par la direction de l'URI, d'abord par l'intermédiaire de M. Bernard Z...et par la suite par Mme Sabine Y...; que le conseil de céans va donc analyser les griefs exposés par M. X...pour justifier la prise d'acte de la rupture ; suppression de la responsabilité de la gestion du compte du secteur juridique : Que pour ce grief, rien de spécial à rajouter pour le conseil de céans sinon que du jour au lendemain M. X...ne pourra plus émettre de chèques, ni utiliser la carte bancaire ; et que d'ajouter que le non-respect de cette interdiction entrainera un dépôt de plainte pour escroquerie ; que le conseil de céans se doit d'admettre que de tels propos sont particulièrement offensants à l'égard d'un militant de longue date n'ayant jamais démérité ; remise en cause des engagements pris lors du contrat triangulaire du 21 juin 1995 : que M. X..., de par son mandat était contraint d'entreprendre de nombreux déplacements ; que depuis 1995, les frais de déplacement et de repas dans le cadre du secteur juridique étaient remboursés, rubis sur l'ongle, sans problème sur simple présentation des pièces justificatives ; que dorénavant la direction de l'URI impose que le déplacement doit avoir été décidé préalablement par la direction de l'URI, faute de quoi les frais ne sont pas pris en charge ; qu'une fois encore, le conseil de céans se doit de constater qu'une telle décision jette un froid dans les relations contractuelles, avec un militant qui se retrouve sur la sellette, alors qu'il n'avait jamais démérité ; suppression de la responsabilité de la formation syndicale juridique : que M. X...perd progressivement son rôle prépondérant de responsable juridique au bénéfice de Mme Y..., et surtout différentes missions lui sont retirées telles que participer à l'élaboration, la préparation et l'animation de la politique juridique, préparer et animer les réunions du secteur juridique, proposer un plan de formation juridique aux responsables de la formation syndicale, participer à la préparation et à l'animation des formations syndicales, inscrites au plan de formation annuel ; que de plus, la direction de l'URI, en la personne de Mme Y..., se réservait de porter son veto sur toutes les initiatives prises par M. X...; que bien entendu, une telle décision a jeté un froid entre les différents intervenants ainsi que l'ensemble des stagiaires, comme le conseil de céans a pu le constater à la lecture de nombreuses attestations versées au dossier ; Retrait de nombreuses autres responsabilités : que M. X...se retrouve donc seul, mis à l'écart, et M. Z...et par la suite Mme Y...lui font expressément comprendre que le seul responsable politique du secteur juridique n'est plus M. X...; que pour le conseil de céans, l'estocade finale de l'URI a eu lieu en 2009, lorsque cette dernière a supprimé la cellule de formation syndicale, avec comme dans une arène, la mise à mort irrémédiablement de M. X...qui n'était plus que l'ombre de lui-même ; qu'une fois encore le conseil de céans a pu le constater à la lecture de nombreuses attestations versées au dossier ; que cependant, pour le conseil de céans, ce litige est avant tout un conflit de personnes, entre M. X...et Mme Y..., que d'un côté, M. X...qui exerce ses fonctions de responsable du secteur juridique de la CFDT Alsace avec la cellule de formation, qui devenait une personne incontournable pour les stages suivis par des défenseurs syndicaux, et essentiellement par des conseillers prud'homaux venus des quatre coins de l'Alsace ; que la réussite de ses stages de formations est d'ailleurs reconnue et félicitée par les attestations de Mme C..., avocate et Mme A..., responsable de la formation juridique des conseillers prud'homaux CFDT pour la période de 1997 à 2003 au sein de l'ISEFOJ, institut agréé par le ministère ; qu'une fois encore, le conseil de céans a pu constater la motivation et les résultats satisfaisants enregistrés par M. X..., à la lecture de nombreuses attestations versées au dossier ; que même l'URI, partie défenderesse reconnaît dans ses conclusions, l'entière confiance faite à M. X..., juqu'en 2007 ; qu'en fait, de par sa notoriété, M. X...devenait un élément gênant, donc à éliminer, avec sa cellule de formation ; que de l'autre côté, Mme Y..., secrétaire régionale de l'URI CFDT Alsace qui a succédé à M. Z..., suite au congrès d'octobre 2010 ; que cette dernière veut asseoir son autorité et comme elle l'a affirmé à la barre lors du bureau de jugement du 18 octobre 2012, s'est vue gratifiée d'un surnom, caporal ; que dans la foulée, Mme B...est nommée pour remplacer M. X...et devient ainsi la secrétaire régionale en charge de la politique juridique ; qu'en agissant de la sorte, le conseil de céans est persuadé que Mme Y...se doutait que M. X...se trouverait affecté, offensé, voire déprimé et par la suite dépressif ; qu'il y a un adage qui dit, il faut diviser pour régner ; que pour le conseil de céans, M. X...ne devait pas rentrer dans les plans de l'URI et comme il était un élément gênant, on lui a fait un certain nombre de reproches pour le déstabiliser encore davantage : difficultés pour établir la liste des défenseurs syndicaux, retards importants dans la transmission de la comptabilité du service juridique, suppression d'abonnements à des revues juridiques ; que c'est pourquoi, le conseil de céans, avait considéré que ce litige était avant tout un conflit de personnes, entre M. X...et Mme Y...; qu'en fait, ce différend fait penser à l'adage : « le pot de fer contre le pot de terre », ou encore David contre Goliath ; qu'en réalité, et dans le cas présent, c'est le pouvoir de direction de l'employeur contre un militant salarié ; que l'URI CFDT a ainsi agi comme un véritable rouleau compresseur et malheureusement, M. X...s'est retrouvé sur son passage, impuissant et à sa merci ; que de plus, la direction de l'URI ne peut pas ignorer que les difficultés rencontrées par M. X...ont altéré son état de santé ;
ALORS, 1°) QUE le juge, tenu de motiver sa décision, doit indiquer les pièces au vu desquelles il a forgé sa conviction ; qu'en s'abstenant d'indiquer les pièces sur lesquelles il s'est fondé pour considérer comme justifiés les griefs relatifs à la « suppression de la responsabilité de la gestion du compte du secteur juridique » et à la « remise en cause des engagements pris lors du contrat triangulaire du 21 juin 1995 », le conseil de prud'hommes n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°) QUE le juge, tenu de motiver sa décision, ne peut se borner à viser les pièces verser aux débats, sans les analyser, même sommairement ; qu'en se bornant, pour considérer comme justifiés les griefs relatifs à « la suppression de la responsabilité de la formation syndicale juridique » et au « retrait de nombreuses autres responsabilités », à viser les « nombreuses attestations versées au dossier » sans les analyser, même sommairement, le conseil de prud'hommes n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 3°), QU'en considérant comme fondé le grief relatif à la « suppression de la responsabilité de la gestion du compte du secteur juridique », sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si cette mesure prise par l'employeur n'était pas liée à l'exercice légitime de son pouvoir de direction et au bon fonctionnement de l'URI CFDT, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
ALORS, 4°), QUE tenu de motiver sa décision, le juge ne peut se borner à reproduire les conclusions de l'une des parties, sans fournir aucune motivation propre ; qu'en reprenant servilement à son compte, pour retenir le grief relatif à la suppression de la responsabilité de la formation syndicale, l'argumentation développée par le salarié dans ses conclusions, sans apprécier, par une motivation propre, ce manquement, le conseil de prud'hommes, qui a statué par une apparence de motivation pouvant faire peser un doute sur son impartialité, a violé l'article 6. 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 455 et 458 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR jugé que l'URI CFDT, par les conditions de travail et l'organisation du travail qu'elle a imposées à M. X..., a provoqué une détérioration de son état de santé et une atteinte grave à sa dignité et, en conséquence, D'AVOIR condamné l'URI CFDT à payer à M. X...la somme de 1 euro à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE M. X...n'a jamais voulu parler de harcèlement moral dans ses relations de travail avec la direction de l'URI mais il a l'impression de revenir quelques années en arrière quand il était à Superba et qu'au regard de l'ensemble des faits relatés, l'URI s'est servi de son pouvoir de direction pour déstabiliser M. X...qui en a souffert. Pour preuve, ses problèmes de santé qui font suite à un ensemble de faits qui par leur apparition s'apparente au harcèlement car dans les relations de travail on constate une atteinte aux conditions de travail, à la santé et à la sécurité du salarié ;
ALORS, 1°), QUE lorsque le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en indiquant qu'au regard « de l'ensemble des faits relatés, l'URI s'est servi de son pouvoir de direction pour déstabiliser M. X...qui en a souffert. Pour preuve, ses problèmes de santé qui font suite à un ensemble de faits qui par leur apparition s'apparente au harcèlement car dans les relations de travail on constate une atteinte aux conditions de travail, à la santé et à la sécurité du salarié », le conseil de prud'hommes, qui n'a pas mis en oeuvre la méthode d'appréciation instituée par la loi, a violé l'article L. 1154-1 du code du travail ;
ALORS, 2°), QU'en observant, pour retenir l'existence d'un harcèlement moral, que « M. X...n'a jamais voulu parler de harcèlement moral dans ses relations de travail avec la direction de l'URI mais il a l'impression de revenir quelques années en arrière quand il était à Superba et qu'au regard de l'ensemble des faits relatés, l'URI s'est servi de son pouvoir de direction pour déstabiliser M. X...qui en a souffert. Pour preuve, ses problèmes de santé qui font suite à un ensemble de faits qui par leur apparition s'apparente au harcèlement car dans les relations de travail on constate une atteinte aux conditions de travail, à la santé et à la sécurité du salarié », le conseil de prud'hommes, qui s'est déterminé par une motivation ne permettant pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, 3°), QUE les juges du fond, tenus de motiver leur décision, doivent examiner, ne serait-ce que succinctement, les pièces versées aux débats par les parties et indiquer dans leur décision les pièces au vu desquelles ils ont forgé leur conviction ; qu'en s'abstenant d'indiquer les pièces sur lesquelles il s'est fondé pour retenir l'existence d'un harcèlement moral ni analyser, ne serait-ce que sommairement, les éléments de preuve versés aux débats par les deux parties, le conseil de prud'hommes n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a, de nouveau, violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS et subsidiairement, 4°), QUE lorsque le salarié établit des faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail, l'employeur conserve la possibilité de démontrer que ces faits ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et qu'ils sont justifiés par des faits étrangers à tout harcèlement ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si les faits dénoncés par le salarié ne s'expliquaient pas par des éléments étrangers à tout harcèlement et étaient liés à l'exercice légitime du pouvoir de direction de l'employeur, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L. 1152-3 et L. 1154-1 du code du travail.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief au jugement attaqué D'AVOIR dit que l'ensemble des faits et circonstances engage la responsabilité de l'URI et justifie les demandes de dommages-intérêts pour M. X...au titre de l'article 1382 du code civil et, en conséquence, D'AVOIR condamné l'URI CFDT à payer à M. X...la somme de 1 euro à titre de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE pour M. X..., le non-respect des conditions de travail contractuellement définies ont amené ce dernier à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur, ayant les effets d'un licenciement abusif ; que dans la présente instance les deux parties s'opposent sur la prééminence des contrats triangulaires passés ; qu'en réalité et dans le cas qui nous intéresse, c'est le pouvoir de direction de l'employeur contre un militant salarié ; que l'URI CFDT a ainsi agi comme un véritable rouleau compresseur et malheureusement, M. X...s'est retrouvé sur son passage, impuissant et à sa merci ; que le conseil de céans regrette, par ailleurs, que l'URI CFDT n'ait pas tenu compte du passé de militant de M. X...ainsi que toutes les formations qu'il a préparées et animées, avec une collaboration étroite de la cellule de formation, qui du coup a été supprimée ; que son acharnement et ses actions de sape ont eu raison de l'état de santé et le moral de M. X...; que lors de l'audience de conciliation du 3 mars 2011, M. X...modifiait la qualification juridique de son action judiciaire en passant par une résiliation judiciaire à une prise d'acte de la rupture avec effet au 31 mars 2011 ; que pour éviter toute polémique, M. X...n'a pas souhaité « se faire du fric » à l'encontre de l'URI, mais voulait simplement que le conseil de céans le conforte dans ses droits, pour exécution déloyale du contrat de travail ; que de plus, pour justifier sa demande, M. X...s'est appuyé sur les dispositions de l'article 1382 du code civil ; qu'en conséquence, le conseil de céans alloue à M. X...la somme symbolique d'un euro de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;
ALORS QUE le principe de non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle interdit à la victime, lorsque les conditions d'application des deux régimes de responsabilité sont cumulativement réunies, d'invoquer les règles délictuelles ; qu'en allouant au salarié des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil, après avoir pourtant constaté que les parties étaient liées par un contrat de travail et que le salarié reprochait à l'employeur une exécution déloyale de ce contrat, le conseil de prud'hommes a violé les articles 1147 et 1382 du code civil.

Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour le syndicat CFDT-métaux du Haut-Rhin.

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté le syndicat CFDT Métaux du Haut-Rhin de sa demande de dommages et intérêts.
AUX MOTIFS QUE sur l'intervention volontaire du syndicat CFDT 68 des Métaux pour le conseil de céans cette intervention volontaire du syndicat CFDT 68 des Métaux est recevable et tout à fait justifiée.
Certes, un contrat tripartite a été régularisé le 21 juin 1995, entre l'URI CFDT Alsace, le syndicat Métaux 68 et monsieur X..., contrat qui n'a jamais été dénoncé. Comme monsieur X..., le syndicat CFDT 68 des Métaux a été, sans aucun doute vexé par l'attitude de madame Y..., qui à tous deux, a voulu clore le litige en leur donnant à chacun 1 €. Or leur action judiciaire, comme celle de monsieur X...ne visait pas à obtenir des dommages et intérêts, mais au contraire, obtenir la condamnation de l'URI pour exécution déloyale du contrat tripartite passé entre l'URI CFDT Alsace, le syndicat métaux 68 et monsieur X.... Cependant, lors de son délibéré, le conseil de céans, suite au bureau de jugement du 18 octobre 2012, n'a pas trouvé dans les pièces versées au dossier un quelconque préjudice, pour ledit syndicat. Certes, il a soutenu monsieur X...durant toute la procédure, mais n'apporte aucun élément probant justifiant sa demande. Qu'en tout état de cause, en l'absence de toute discrimination, aucun préjudice n'est subi par le syndicat et aucun montant ne peut lui être alloué. D'où le débouté.

1) ALORS QUE l'inexécution fautive par l'employeur des obligations résultant d'un contrat passé entre lui-même, un salarié et une organisation syndicale cause nécessairement à cette dernière un préjudice ; que pour débouter le syndicat CFDT 68 des Métaux de sa demande de dommages et intérêts, le conseil de prud'hommes a estimé qu'il ne justifiait d'aucun préjudice ; qu'en statuant ainsi quand il constatait l'exécution déloyale du contrat tripartite du 21 juin 1995 régularisé entre l'URI CFDT Alsace, le syndicat CFDT 68 des Métaux et monsieur X..., le conseil de prud'hommes a violé l'article 1382 du code civil ;
2) ALORS QU'en subordonnant l'existence du préjudice du syndicat à une discrimination, le conseil de prud'hommes a derechef violé l'article 1382 du code civil ;
3) ALORS QU'en refusant d'indemniser le syndicat CFDT 68 des Métaux après avoir constaté qu'il avait assisté le salarié durant toute la procédure, le conseil de prud'hommes a violé l'article 1382 du code civil.

ECLI:FR:CCASS:2014:SO01169
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