Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 9 janvier 2013, 11-25.646, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 septembre 2011), que M. X..., employé par l'association Groupe Audiens en dernier lieu en qualité d'inspecteur au sein du pôle de gestion, a été licencié le 25 janvier 2007 pour motif disciplinaire ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale de demandes d'indemnités ; que le syndicat CGT des personnels du Groupe Audiens est intervenu volontairement à la procédure ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer au salarié des dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que l'article 34 de la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993, consacré à l'énumération des sanctions et à la procédure disciplinaire applicable dispose que "le motif de la mesure disciplinaire envisagée par la direction doit être notifié par écrit à l'intéressé avant que la mesure entre en application" ; que ce texte, qui impose uniquement que le motif de la mesure soit notifié avant sa mise en oeuvre, c'est-à-dire avant l'exécution de la sanction, n'exige pas qu'il soit mentionné dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, laquelle ne constitue que le premier acte de la procédure disciplinaire ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres constatations de l'arrêt attaqué, d'une part que M. X... avait été convoqué par lettre du 3 janvier 2007, à un entretien préalable à son licenciement, qui s'était tenu le 12 janvier suivant, d'autre part, que la lettre de licenciement du 25 janvier 2007 lui avait notifié par écrit les motifs de ce licenciement, de sorte que la procédure conventionnelle avait été respectée ; qu'en décidant le contraire, motif pris de ce que l'article 34 exigerait la mention des motifs du licenciement envisagé dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, la cour d'appel a violé par fausse interprétation la disposition conventionnelle susvisée ;

2°/ que, en toute hypothèse, que l'énonciation de l'objet de l'entretien dans la lettre de convocation adressée au salarié par un employeur qui veut procéder à son licenciement et la tenue d'un entretien préalable au cours duquel le salarié, qui a la faculté d'être assisté, peut se défendre contre les griefs formulés par son employeur, satisfont à l'exigence de loyauté et de respect des droits du salarié ; que dès lors, la mention des motifs du licenciement envisagé dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, dont l'absence ne prive pas le salarié de la possibilité d'assurer utilement sa défense, ne constitue pas une garantie de fond, de sorte que sa méconnaissance, par l'employeur, ne prive pas de cause réelle et sérieuse le licenciement intervenu ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé derechef l'article 34 de la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993, ensemble l'article L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que l'article 34 de la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993 dispose en ses alinéas 4 et 5 que le motif de la mesure disciplinaire envisagée par la direction doit être notifié par écrit à l'intéressé avant que la mesure entre en application et que tout agent doit être entendu par la direction avant une mesure disciplinaire pour obtenir la justification du motif invoqué et faire valoir ses explications ; qu'il résulte de ces dispositions, qui concernent l'ensemble des mesures disciplinaires, que l'employeur doit, antérieurement à l'entretien préalable au licenciement pour motif disciplinaire, notifier au salarié par écrit les motifs de la mesure qu'il envisage ; que ce texte, qui institue une protection des droits de la défense supérieure à celle prévue par la loi, constitue une garantie de fond ;

Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que le salarié n'avait pas reçu, avant l'entretien préalable au licenciement, notification des motifs de la mesure de licenciement disciplinaire envisagée, en a exactement déduit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'association Groupe Audiens aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Groupe Audiens à payer à M. X... et au syndicat CGT des personnels du Groupe Audiens la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf janvier deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt.

Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour l'association Groupe Audiens.

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de Monsieur Christian X... par l'Association Groupe Audiens et condamné cet employeur à verser au salarié une somme de 75 000 € à titre de dommages et intérêts, outre 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE "M. X... a été licencié aux motifs d'une insuffisance chronique de résultats par référence à des entretiens annuels d'évaluation depuis 2001, une activité nettement insuffisante en deçà des objectifs fixés, une absence totale de dialogue avec sa hiérarchie et de transparence, une insubordination caractérisée, une désinvolture, sa malhonnêteté pour tenter de masquer son incurie ; qu'un tel licenciement a caractère disciplinaire ;

QUE sur le moyen d'appel tiré du non-respect de la procédure conventionnelle de licenciement, aux termes de l'article 34 de la Convention collective des Institutions de Retraites Complémentaires, en ses dispositions contemporaines du licenciement, les différentes mesures disciplinaires sont l'avertissement, le blâme, la mise à pied limitée à 5 jours ouvrés, le licenciement avec préavis et indemnité de licenciement, le licenciement pour faute lourde sans préavis ni indemnité de licenciement ; que le motif de la mesure disciplinaire envisagée par la direction doit être notifié par écrit à l'intéressé avant que la mesure entre en application ;

QUE cette dernière disposition est donc plus favorable au salarié, informé par écrit de tous les motifs de la mesure disciplinaire envisagée avant même sa mise en application, peu important le fait que le règlement intérieur de l'entreprise ne la reprenne pas ; que contrairement à ce que soutient le groupe Audiens la mesure de licenciement pour motif disciplinaire relève de ces dispositions, ce qui s'évince de l'énumération conventionnelle précitée des mesures disciplinaires ;

QU'en l'espèce, le groupe Audiens n'a pas notifié par écrit préalable les motifs disciplinaires de la mesure de licenciement envisagée à l'encontre de M. X... ; que le respect de la procédure légale et conventionnelle de licenciement, avec convocation du salarié à un entretien préalable, ne l'exonérait pourtant pas de notifier alors à celui-ci ces motifs par écrit afin que l'intéressé prépare utilement sa défense ;

QUE la garantie conventionnelle d'une notification écrite préalable des motifs disciplinaires du licenciement envisagé constitue une règle de fond dont l'inobservation rend sans cause réelle et sérieuse cette mesure" ;

1°) ALORS QUE l'article 34 de la Convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993, consacré à l'énumération des sanctions et à la procédure disciplinaire applicable dispose que " le motif de la mesure disciplinaire envisagée par la direction doit être notifié par écrit à l'intéressé avant que la mesure entre en application" ; que ce texte, qui impose uniquement que le motif de la mesure soit notifié avant sa mise en oeuvre, c'est à dire avant l'exécution de la sanction, n'exige pas qu'il soit mentionné dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, laquelle ne constitue que le premier acte de la procédure disciplinaire ; qu'en l'espèce, il ressortait des propres constatations de l'arrêt attaqué, d'une part que Monsieur X... avait été convoqué par lettre du 3 janvier 2007, à un entretien préalable à son licenciement, qui s'était tenu le 12 janvier suivant, d'autre part, que la lettre de licenciement du 25 janvier 2007 lui avait notifié par écrit les motifs de ce licenciement, de sorte que la procédure conventionnelle avait été respectée ; qu'en décidant le contraire, motif pris de ce que l'article 34 exigerait la mention des motifs du licenciement envisagé dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, la Cour d'appel a violé par fausse interprétation la disposition conventionnelle susvisée ;

2°) ALORS en toute hypothèse QUE l'énonciation de l'objet de l'entretien dans la lettre de convocation adressée au salarié par un employeur qui veut procéder à son licenciement et la tenue d'un entretien préalable au cours duquel le salarié, qui a la faculté d'être assisté, peut se défendre contre les griefs formulés par son employeur, satisfont à l'exigence de loyauté et de respect des droits du salarié ; que dès lors, la mention des motifs du licenciement envisagé dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, dont l'absence ne prive pas le salarié de la possibilité d'assurer utilement sa défense, ne constitue pas une garantie de fond, de sorte que sa méconnaissance, par l'employeur, ne prive pas de cause réelle et sérieuse le licenciement intervenu ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé derechef 34 de la Convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993, ensemble l'article L. 1235-1 du Code du travail.

ECLI:FR:CCASS:2013:SO00017
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