Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 17 octobre 2012, 11-10.910, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société guadeloupéenne Distrivit, qui distribue des produits du tabac et des produits alimentaires, a engagé M. X... suivant contrat à durée indéterminée en date du 1er janvier 1994, en qualité de responsable commercial ; que le salarié a été promu directeur de la société à compter de janvier 2000 ; qu'il a été convoqué à un entretien préalable en vue de son licenciement, le 7 avril 2006 ; que la société Distrivit lui a notifié son licenciement, d'abord par une lettre remise en mains propres, le 18 avril 2006, puis par un courrier recommandé avec accusé de réception, le 19 avril 2006 ; que le salarié n'ayant pas retiré ce dernier courrier à la poste, celui-ci a été retourné à la société le 10 mai 2006 ; qu'un second courrier recommandé adressé à M. X... le 12 juin 2006 n'a pas été retiré non plus à la poste et a été retourné le 5 juillet 2006 ; qu'un protocole transactionnel a été signé par les parties le 15 juin 2006 ; que la société Distrivit a saisi la juridiction prud'homale en vue de voir prononcer la nullité du protocole transactionnel établi alors que le salarié n'avait pas encore reçu notification de la lettre de licenciement dans les formes légales ou, subsidiairement, la résolution judiciaire du même protocole et d'obtenir condamnation du défendeur à lui rembourser l'indemnité versée en exécution du protocole transactionnel ainsi que des dommages-intérêts à titre de réparation de son préjudice financier, M. X... sollicitant à titre reconventionnel la résolution judiciaire du protocole transactionnel aux torts exclusifs de l'employeur ainsi que le paiement de diverses sommes ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter la société Distrivit de sa demande de résolution judiciaire de la transaction, l'arrêt retient que la nullité d'une transaction résultant de ce qu'elle a été conclue avant la notification du licenciement est une nullité relative instituée dans l'intérêt du salarié et ne peut dès lors être invoquée par l'employeur ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur faisant valoir que le salarié avait usé de prétextes fallacieux pour se prétendre libéré des obligations résultant du protocole transactionnel et se croire autorisé à commercialiser seul les produits de la société Champexport, ce qui justifiait selon lui la résolution judiciaire du protocole transactionnel aux torts du salarié, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche, subsidiaire, du moyen unique :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Le Griel, avocat aux Conseils, pour la société Distrivit.

Le pourvoi reproche à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes en nullité et résolution judiciaire du protocole transactionnel formulées par l'employeur,

aux motifs que, d'une part, en cas de licenciement, une transaction ne peut être conclue qu'une fois la rupture devenue définitive, c'est-à-dire qu'une fois que la lettre de licenciement a été effectivement retirée par le salarié, qu'en effet le salarié doit être à même de négocier une transaction sur les conséquences de son licenciement et donc avoir une connaissance certaine des motifs invoqués par l'employeur à l'appui dudit licenciement, qu'il appartient donc à l'employeur de s'assurer, lors de la signature de la transaction, que le salarié a bien réceptionné la lette de licenciement, voire en attendant le retour de l'accusé de réception, qu'en l'occurrence, la transaction a été conclue alors que le salarié n'avait pas accusé réception de la lettre recommandée de licenciement qui lui avait été adressée à deux reprises et qu'il n'avait pas retirée à la poste, que, cependant, si la transaction a été conclue, comme en l'espèce, avec un salarié ordinaire (non protégé), sa nullité résultant de ce qu'elle a été conclue avant la notification du licenciement est une nullité relative, instituée dans l'intérêt du salarié, qu'elle ne peut dès lors être invoquée par l'employeur, la société DISTRIVIT,

1°) alors qu' une transaction suppose une contestation, née ou à naître, et des concessions réciproques, lesquelles font nécessairement défaut, en cas de licenciement, lorsque le salarié n'ayant pas eu connaissance des motifs du licenciement, n'a pas été mis en mesure de contester celui-ci, qu'une transaction conclue avant que le salarié ait eu connaissance effective des motifs du licenciement par la réception de la lettre de licenciement prévue à l'article L 1232-6 du Code du travail est ainsi dépourvue d'objet et donc nulle d'une nullité absolue pouvant être invoquée par tout intéressé et qu'en refusant en l'occurrence à l'employeur le droit d'invoquer cette nullité, la Cour d'appel a violé les articles 1108, 1126, 1304 et 2044 du Code civil,

aux motifs que, d'autre part, la société DISTRIVIT soutient que son ex-salarié, Monsieur X... a menti sur le retrait de sa lettre de licenciement et a contracté de mauvaise foi, emportant, frauduleusement la signature de l'employeur du protocole transactionnel, et demande en conséquence de la recevoir en sa demande de résolution judiciaire du protocole transactionnel, que, toutefois, comme rappelé ci-dessus, la nullité d'une transaction résultant de ce qu'elle a été conclue avant la notification du licenciement est une nullité relative instituée dans l'intérêt du salarié et qu'elle ne peut dès lors être invoquée par l'employeur, la société DISTRIVIT,

2°) alors que la Cour d'appel a ainsi dénaturé les écritures de l'employeur qui avait fait état des manoeuvres frauduleuses du salarié au soutien de sa demande en nullité du protocole transactionnel pour dol et non de sa demande en résolution judiciaire du même protocole et qu'elle a, par là même, violé l'article 1134 du Code civil,

3°) alors qu' en omettant de répondre aux conclusions de l'employeur soulignant que le salarié avait usé de prétextes fallacieux pour se prétendre libéré des obligations résultant du protocole transactionnel et se croire autorisé à commercialiser seul les produits de la société CHAMPEXPORT, ce qui justifiait la résolution judiciaire du protocole transactionnel aux torts du salarié, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un grave défaut de motifs et violé l'article 455 du Code de procédure civile.

Retourner en haut de la page