Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 11 janvier 2012, 10-18.452, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Donne acte à la société Pochet du Courval de ce qu'elle reprend l'instance ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., salariée de la société Verreries de Courval, aux droits de laquelle vient la société Pochet du Courval (la société), a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant d'une part au paiement d'un rappel de salaire et de perte de repos compensateur au titre du Jeudi de l'ascension 2008 qui coïncidait cette année avec le 1er mai, et d'autre part à l'annulation d'une sanction disciplinaire ; que le syndicat CGT des Verreries du Courval (le syndicat) s'est joint à la procédure ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée des sommes au titre du paiement du jeudi de l'Ascension et de la perte du repos compensateur non-accordé, alors, selon le moyen, qu'en l'absence de dispositions conventionnelles ouvrant aux salariés, lorsqu'un jour férié coïncide avec un jour de repos, le droit de bénéficier d'un repos compensateur supplémentaire ou d'une indemnité représentative de ce jour de repos, la cour d'appel ne pouvait, à raison du fait que le jeudi de l'ascension avait coïncidé en 2008 avec le 1er mai, travaillé par Mme X... avec paiement d'un salaire majoré, estimer que celle-ci devait bénéficier d'une indemnité représentative du jeudi de l'Ascension et d'un repos compensateur supplémentaire dont elle aurait été ainsi privée du bénéfice, sans méconnaître l'article 31 de la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main, semi-automatique et mixte ;

Mais attendu que selon l'article 31 de la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main du 3 novembre 1994, les ouvriers bénéficient en plus du paiement de la journée du 1er mai, du paiement de tous les jours fériés dont le jeudi de l'Ascension, ces jours étant chômés et indemnisés dans les conditions prévues par la loi en ce qui concerne le 1er mai ; que le jour férié travaillé non récupéré tombant un dimanche est indemnisé à 300 %, soit 100 % pour le travail normal, 100 % pour le jour férié et 100 % pour le dimanche ; qu'il en résulte que les salariés ont droit au paiement de onze jours fériés par an ;

Que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a décidé que la salariée pouvait prétendre au respect de ce nombre de jours lorsque deux fêtes chômées coïncidaient un même jour et devait recevoir l'indemnisation correspondant au jeudi de l'Ascension dont elle avait été privée ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi incident de la salariée et du syndicat :

Vu l'article 4 du code de procédure civile ;

Attendu que pour réformer le jugement ayant annulé la sanction prise à l'encontre de la salariée, l'arrêt retient que cette dernière n'établit pas, par la seule production de la lettre du 11 janvier 2009 dont rien n'indique qu'elle ait été remise en mains propres et d'une attestation qui ne rapporte que sa présence dans l'atelier de tri automatique le dimanche 11 janvier 2009 jusqu'à 13 heures, l'existence d'un conflit collectif de travail justifiant le fait qu'elle n'ait pas continué à occuper son poste dans le cadre de "l'auto remplacement" ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur ne contestait pas avoir été averti de la grève au moyen d'une note remise par la salariée immédiatement après l'abandon de son poste de travail, la cour d'appel qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident de la salariée et du syndicat :

Vu les articles 549 et 550 du code de procédure civile ;

Attendu que l'appel incident ou provoqué peut émaner de toute personne ou être dirigé contre toute personne ayant été partie en première instance et peut être formé en tout état de cause, alors même que celui qui l'interjetterait serait forclos à agir à titre principal ;

Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel interjeté par le syndicat, l'arrêt retient que la société ayant limité son appel aux dispositions du jugement l'ayant condamnée au profit de la salariée, le syndicat n'est dès lors pas recevable à former un appel incident, par voie de conclusions, alors que le délai d'appel dont il bénéficiait était écoulé ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'appel provoqué par le syndicat CGT qui était partie en première instance, pouvait être formé en tout état de cause, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à annuler la sanction disciplinaire d'un jour de mise à pied en date du 3 février 2009, déchargé la société Verreries de Courval de la condamnation à rémunérer la journée de mise à pied et déclaré irrecevable l'appel interjeté par le syndicat CGT, l'arrêt rendu le 30 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société Pochet du Courval aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Pochet du Courval à payer à Mme X... et au syndicat CGT des Verreries du Courval, la somme globale de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils pour la société Pochet du Courval venant aux droits de la société Verreries du Courval (demanderesse au pourvoi principal).

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Verreries du Courval a payer à Madame X... la somme de 161,28 euros au titre du paiement du jeudi de l'Ascension, celle de 80,64 euros au titre de la perte du repos compensateur non-accordé et celle de 500 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Aux motifs propres que les rapports des parties sont réglés notamment par la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main, semi-automatique et mixte, que Madame X... a travaillé le jeudi 1er mai 2008, qui était également le jeudi de l'Ascension et que la société lui a réglé en sus de son salaire habituel la somme de 175,28 euros correspondant au salaire habituel d'une journée de travail majorée de 100 % ; qu'en application de l'article 31 étendu de la convention collective, après trois mois de présence dans l'établissement, les ouvriers bénéficient en plus du paiement de la journée du 1er mai, du paiement de 10 jours de fêtes légales, dont le jeudi de l'Ascension, ces jours fériés étant fériés et indemnisés dans les conditions prévues par la loi en ce qui concerne le 1er mai ; qu'en application des dispositions de l'article L.3133-6 du Code du travail, les salariés occupés le 1er mai ont droit, en plus du salaire correspondant au travail accompli, à une indemnité égale au montant de ce salaire, cette majoration est en application des dispositions de l'article 31 de la convention collective, applicable aux fêtes légales qu'elle vise outre le 1er mai ; qu'en application de l'article 4 de l'accord de rapprochement du 23 novembre 1992, l'agent travaillant un jour férié légal a droit, en plus du salaire correspondant au travail effectué à une indemnité égale au montant du salaire et un repos compensateur (excepté s'il s'agit du dimanche, ce qui n'est pas le cas en l'espèce) les deux avantages se cumulant ; conformément à ces dispositions, Monsieur sic X..., qui a travaillé le jeudi de l'Ascension tombant un 1er mai, avait donc droit en plus du paiement de son salaire habituel, à la majoration applicable à ce jour et à un jour de repos compensateur ainsi qu'au respect du nombre de jours fériés chômés conventionnels et à leur indemnisation conventionnelle et, la décision dont appel devant être confirmée en ce qu'elle lui a alloué les sommes de 164,28 euros au titre du jeudi de l'Ascension et 84,64 euros au titre de la perte d'un jour de repos compensateur ;

Et aux motifs, le cas échéant repris des premiers juges, que la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main et la convention du verre mécanique précise en son article 31 : «après trois mois de présence dans l'établissement, les ouvriers bénéficient du paiement du 1er mai» ; que Madame Annick X... a travaillé ce 1er mai 2008 et a été indemnisée ; que le jeudi de l'Ascension coïncide avec le 1er mai, la convention applicable prévoit pour les ouvriers présents à une majoration de 100 % et d'un repos compensateur ; que la SA Verreries du Courval se verra condamnée au paiement de la somme de 161,28 euros pour le jeudi de l'Ascension travaillé et de la somme de 80,64 euros à titre de dommages et intérêts pour perte d'un repos compensateur non accordé ;

Alors qu'en l'absence de dispositions conventionnelles ouvrant aux salariés, lorsqu'un jour férié coïncide avec un jour de repos, le droit de bénéficier d'un repos compensateur supplémentaire ou d'une indemnité représentative de ce jour de repos, la Cour d'appel ne pouvait, à raison du fait que le jeudi de l'ascension avait coïncidé en 2008 avec le 1er mai, travaillé par Madame X... avec paiement d'un salaire majoré, estimer que celle-ci devait bénéficier d'une indemnité représentative du jeudi de l'ascension et d'un repos compensateur supplémentaire dont elle aurait été ainsi privée du bénéfice, sans méconnaître l'article 31 de la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main, semi-automatique et mixte ;
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour Mme X... et le syndicat CGT des Verreries du Courval (demandeurs au pourvoi incident).

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Mme X... et du syndicat CGT tendant à l'annulation de la mise à pied disciplinaire dont elle a été l'objet et au paiement des salaires indument retenus à ce titre

AUX MOTIFS QUE Madame X... n'établit pas par la seule production de la lettre du 11 janvier 2009 dont rien n'indique qu'elle ait été remise en mains propres et de l'attestation de Mme Y... qui ne rapporte que sa présence dans l'atelier de tri automatique le dimanche 11 janvier 2009 jusqu'à 13 heures l'existence d'un conflit collectif de travail justifiant le fait qu'elle n'ait pas continué à occuper son poste dans le cadre de l'auto remplacement

ALORS QUE l'employeur ne contestait pas avoir été averti de la grève décidée, mais soutenait seulement que cette grève était la conséquence ou un prétexte pour Mme X... de ne pas tenir son poste ; qu'en affirmant que rien n'indiquait que la lettre informant de la grève avait été remise en mains propres, la Cour d'appel a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande du syndicat CGT des Verreries de Courval tendant à obtenir la condamnation de la SA VERRERIES DU COURVAL au paiement de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE la société VERRERIES du COURVAL a limité son appel aux dispositions du jugement l'ayant condamnée au profit de Mme X... ; le syndicat CGT n'est dès lors pas recevable à former un appel incident par voie de conclusions, alors que le délai d'appel dont il bénéficiait est expiré.

ALORS QUE l'appel provoqué peut être interjeté par toute personne, même non intimée, ayant été partie en première instance , sur l'appel principal ou incident qui le provoque; qu'en déclarant irrecevables les conclusions d'appel du syndicat CGT, la Cour d'appel a violé l'article 549 du Code de procédure civile.
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