Cour de cassation, Chambre mixte, 22 février 2008, 06-11.934, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, siégeant en CHAMBRE MIXTE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1° / Mme Brigitte X...,

2° / M. Daniel Y...,

domiciliés tous deux...,

contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2005, par la cour d'appel de Riom (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1° / à la société Generali assurance vie, anciennement dénommée Generali France assurances-vie, dont le siège est 7 boulevard Haussmann,75009 Paris,

2° / à M. André A..., domicilié..., ...,03100 Montluçon,

3° / à l'Association tutélaire montluçonnaise, dont le siège est 7 boulevard de Courtais, BP 1212,03100 Montluçon, prise en qualité de curatrice de M. André A...,

défendeurs à la cassation ;

Par arrêt du 4 juillet 2007, la deuxième chambre civile a renvoyé le pourvoi devant une chambre mixte. Le premier président a, par ordonnance du 29 janvier 2008, indiqué que cette chambre mixte serait composée des première et deuxième chambres civiles et de la chambre commerciale, financière et économique ;

Les demandeurs invoquent devant la chambre mixte, le moyen de cassation annexé au présent arrêt ;

Ce moyen unique a été formulé dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat de Mme X... et de M. Y... ;

Un mémoire et des conclusions banales en défense ont été déposées au greffe de la Cour de cassation par la SCP Peignot et Garreau, avocat de la société Generali assurance vie ;

Des observations et des observations complémentaires en défense ont été déposées au greffe de la Cour de cassation par la SCP Tiffreau, avocat de l'Association tutélaire montluçonnaise et de M. A... ;

Le rapport écrit de Mme Aldigé, conseiller, et l'avis écrit de M. de Gouttes, premier avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;

Une note du 9 novembre 2007 du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique adressée au procureur général a été communiquée aux parties ;

Sur quoi, LA COUR, siégeant en chambre mixte, en l'audience publique du 8 février 2008, où étaient présents : M. Lamanda, premier président, Mme Favre, MM. Bargue, Gillet, présidents, Mme Aldigé, conseiller rapporteur, Mme Garnier, MM. Mazars, Pluyette, Gallet, Albertini, Falcone, Kriegk, Mme Pezard, conseillers, M. de Gouttes, premier avocat général, Mme Stéfanini, directeur de greffe adjoint ;

Sur le rapport de Mme Aldigé, conseiller, les observations de la SCP Delaporte, Briard et Trichet, de la SCP Peignot et Garreau, de la SCP Tiffreau, l'avis de M. de Gouttes, premier avocat général, auquel les

parties invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom,10 novembre 2005), que, le 2 novembre 1999, M. A... a souscrit un contrat d'assurance sur la vie auprès de la société Generali (l'assureur), d'une durée de trente ans, prévoyant la constitution d'un capital, payable à son terme à l'assuré ou, en cas de décès de ce dernier, à M. Y... et à Mme X..., bénéficiaires désignés ; que ceux-ci ont accepté cette stipulation faite en leur faveur ; que M. A..., désirant racheter son contrat, en application d'une clause prévoyant expressément cette possibilité, s'est vu opposer un refus de l'assureur ; que M. A... a assigné l'assureur pour obtenir l'annulation du contrat et, subsidiairement, sa réduction ;

Attendu que Mme X... et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir dit que M. A... était bien fondé à exercer le rachat du contrat d'assurance-vie souscrit, alors, selon le moyen, que tant que le contrat n'est pas dénoué, le souscripteur est seulement investi, sauf acceptation du bénéficiaire désigné, du droit personnel de faire racheter le contrat et de désigner ou de modifier le bénéficiaire de la prestation ; que sauf accord contraire de sa part, l'acceptation du bénéficiaire désigné interdit au souscripteur de faire racheter le contrat ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 132-8, L. 132-9, L. 132-12 et L. 132-14 du code des assurances ;

Mais attendu que lorsque le droit de rachat du souscripteur est prévu dans un contrat d'assurance-vie mixte, le bénéficiaire qui a accepté sa désignation n'est pas fondé à s'opposer à la demande de rachat du contrat en l'absence de renonciation expresse du souscripteur à son droit ;

Et attendu qu'ayant relevé que le contrat souscrit par M. A... garantissait le droit de rachat pour le cas où le souscripteur entendrait disposer des fonds, la cour d'appel a exactement décidé que M. A... était fondé à exercer ce droit auquel il n'avait pas renoncé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... et M. Y..., ensemble, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... et M. Y..., ensemble, à payer à M. A... et à l'Association tutélaire montluçonnaise la somme de 2 000 euros et à la société Generali assurance vie la somme de 1 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en chambre mixte, et prononcé par le premier président, en son audience publique du vingt-deux février deux mille huit.

Moyen annexé à l'arrêt n° 262 P + B + R + I (Chambre mixte)

Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils pour Mme X... et M. Y....

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit que M. A... était bien fondé à exercer le rachat du contrat d'assurance vie souscrit le 2 novembre 1999 auprès de la SA GENERALI ASSURANCE VIE ;

Aux motifs que " selon le contrat souscrit, les consorts E... sont bénéficiaires de la somme assurée en cas de décès de M. A... qui est censé à titre principal récupérer son investissement à l'issue d'une durée de 30 ans ; que ledit contrat prévoit expressément la possibilité d'un rachat total ou partiel ; que l'article L 132-21 du code des assurances consacre le droit à rachat et que la seule difficulté résulte de sa confrontation aux dispositions de l'article L 132-9 du même code selon lesquelles la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé devient irrévocable par l'acceptation expresse de ce dernier ; que ce dernier texte ne rend irrévocable que la désignation du bénéficiaire ; que M. A... n'a désigné les consorts E... comme bénéficiaires que des sommes qui subsisteraient lors de son décès alors que le contrat garantit par ailleurs le droit de rachat pour le cas où le souscripteur entendrait disposer des fonds pour satisfaire ses propres besoins, sans que l'acceptation des bénéficiaires puisse constituer un obstacle ; que ces derniers ne disposent en l'état d'aucune créance qui ne sera éventuellement constituée qu'au décès du souscripteur ; qu'ils ne peuvent prétendre avoir bénéficié d'une libéralité consentie irrévocablement ; que le souscripteur n'a jamais entendu se départir définitivement des sommes investies dans l'assurance-vie, celles-ci ne devant revenir aux bénéficiaires qu'à son décès et devant en priorité profiter au souscripteur soit à l'échéance normale du contrat soit par l'exercice de la faculté de rachat ; que le rachat étant admis, il devient sans intérêt d'examiner la responsabilité contractuelle de l'assureur retenue par le tribunal dont la décision conduisait pourtant à condamner l'assureur tout en laissant subsister le contrat " (arrêt attaqué, p. 4, § 2 à 6).

Alors que tant que le contrat n'est pas dénoué, le souscripteur est seulement investi, sauf acceptation du bénéficiaire désigné, du droit personnel de faire racheter le contrat et de désigner ou de modifier le bénéficiaire de la prestation ; que sauf accord contraire de sa part, l'acceptation du bénéficiaire désigné interdit au souscripteur de faire racheter le contrat ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L 132-8, L 132-9, L 132-12 et L 132-14 du code des assurances.

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