Cour de Cassation, Chambre sociale, du 7 février 2001, 98-45.570, Inédit

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Eric X..., demeurant ... aux Chartrains,

en cassation d'un arrêt rendu le 7 septembre 1998 par la cour d'appel de Caen (3ème chambre, section sociale), au profit de M. Xavier Z..., demeurant Résidence Le Grand Cap, Bâtiment C, rue Martois, 14640 Villers-sur-Mer,

défendeur à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 13 décembre 2000, où étaient présents : M. Le Roux-Cocheril, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Texier, conseiller rapporteur, Mme Quenson, conseiller, Mme Bourgeot, M. Besson, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Texier, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. X..., de la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, avocat de M. Z..., les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. Z... a été embauché par M. X... le 4 mars 1989 en qualité de lad ; qu'il a été en arrêt maladie du 26 juin au 1er septembre 1995, puis à partir du 23 février 1996 ; que, par lettre du 9 juillet 1996, l'employeur l'a licencié ; qu'il a alors saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Caen, 7 septembre 1998) de l'avoir condamné à payer à M. Z... des sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et indemnités compensatrices de congés payés afférents, ainsi que des dommages-intérêts compensateurs et par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors, selon le moyen, qu'en énonçant, pour retenir le décompte des heures supplémentaires établi par M. Z..., que M. X... ne lui opposait d'autre démenti que l'affirmation selon laquelle ce décompte serait fantaisiste, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de M. X... qui faisait valoir que la mauvaise foi de M. Z... dans l'établissement de ce décompte ressortait du fait qu'il prétendait que ses horaires étaient différents selon les saisons, ce qui n'était pas le cas, les horaires n'étant pas les mêmes pour les périodes de courses et celle de décembre à mars où il n'y avait pas de courses ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 4 du nouveau Code de procédure civile et l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 212-1-1 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut, pour rejeter une demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ;

Et attendu que la cour d'appel a relevé, sans dénaturation, que le salarié fournissait une description précise des tâches qu'il accomplissait au-delà de l'horaire légal et que l'employeur ne produisait aucun élément ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. Z... une somme à titre de dommages-intérêts compensateurs, alors, selon le moyen, que les juges ne peuvent allouer des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires sans constater l'existence pour le créancier d'un préjudice indépendant du retard apporté au paiement par le débiteur et causé par sa mauvaise foi ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater la mauvaise foi de M. X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1153 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que l'employeur n'avait jamais payé les heures supplémentaires dues depuis plusieurs années, a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que cette carence justifiait l'allocation de dommages-intérêts distincts des intérêts de droit ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que l'employeur fait enfin grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. Z... des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1 ) qu'il ressort des énonciations de l'arrêt que M. Z... avait été absent de l'entreprise du 27 juin au 1er septembre 1995, puis du 23 février au 9 juillet 1996, date de la notification du licenciement, que l'effectif de l'entreprise se réduisait, outre M. Z..., à un effectif de deux salariés (en réalité, un salarié et une apprentie) renforcé par la présence d'une salariée à temps partiel, et qu'il avait été effectivement remplacé par un autre lad, M. Y... ; qu'en estimant néanmoins que l'existence d'un trouble suffisamment grave pour rendre indispensable le remplacement de M. Z... n'était pas établie, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, et a violé les articles L. 122-14-3 et L. 122-14-5 du Code du travail ;

2 ) qu'en tout état de cause, en l'état des constatations précitées, la cour d'appel ne pouvait dire le licenciement de M. Z... abusif, en se bornant à faire état du faible niveau de qualification de celui-ci, sans préciser quelles étaient les fonctions qu'il occupait ; qu'en statuant sur ce seul fondement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 122-14-3 et L. 122-14-5 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, exerçant le pouvoir d'appréciation qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail, a décidé que le licenciement du salarié était sans cause réelle et sérieuse ;

que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille un.

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