Cour administrative d'appel de Paris, Formation plénière, 18/06/2012, 11PA00758

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu, I, sous le n° 11PA00758, la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement les 11 et 22 février 2011, présentés pour la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION, dont le siège social est Bois de Boulogne, avenue du Mahatma Gandhi, à Paris (75116), par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard ; la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802827 du 20 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé le permis de construire en date du 8 août 2007 par lequel le maire de Paris a autorisé la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION à édifier un bâtiment à usage de musée d'art contemporain dans le Bois de Boulogne ;

2°) de rejeter la demande présentée par la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne devant le Tribunal administratif de Paris ;

3°) subsidiairement, de limiter, en application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, la portée de l'annulation du permis de construire contesté aux éléments dissociables dont la conception peut être redéfinie indépendamment de l'ensemble de la structure ;

4°) de mettre à la charge de la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu, II, sous le n° 11PA00812, la requête, enregistrée le 16 février 2011, présentée pour la VILLE DE PARIS, représentée par son maire en exercice, par Me Foussard ; la VILLE DE PARIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802827 du 20 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a annulé le permis de construire en date du 8 août 2007 par lequel le maire de Paris a autorisé la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION à édifier un bâtiment à usage de musée d'art contemporain dans le Bois de Boulogne ;

2°) de mettre à la charge de la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, notamment son article 70 ;

Vu la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, notamment son article 10 ;

Vu l'ordonnance du 11 octobre 2011 par laquelle la Cour a transmis au Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 10 de la loi n° 2011-590 du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique ;

Vu la décision du 30 décembre 2011 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2011-224 QPC du 24 février 2012, publiée au Journal officiel de la République française du 25 février 2012, statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juin 2012 :

- le rapport de M. Even, rapporteur,

- les conclusions de Mme Vidal, rapporteur public,

- et les observations de Me Barthélemy et Me Guillini, pour la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION, celles de Me Froger, pour la VILLE DE PARIS, et celles de Me Pouilhe, pour la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne ;

Considérant que les requêtes de la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION et de la VILLE DE PARIS tendent à l'annulation d'un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que, par une décision en date du 18 juin 2010, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé la délibération des 12 et 13 juin 2006 du Conseil de Paris en tant qu'elle avait approuvé les articles N 6 et N 7 du règlement du plan local d'urbanisme (P.L.U.) de Paris, relatifs à l'implantation des constructions par rapport aux voies et aux limites séparatives dans la zone naturelle et forestière (N) ; que cette annulation partielle a, conformément aux dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, eu pour effet de remettre en vigueur les dispositions des articles ND 6 et ND 7 du règlement du plan d'occupation des sols (P.O.S.) immédiatement antérieur, dès lors que ces dispositions ne sont pas incompatibles avec celles du règlement du P.L.U. qui restent en vigueur ;

Considérant que le Tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué du 20 janvier 2011, annulé le permis de construire en date du 8 août 2007 par lequel le maire de Paris a autorisé la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION à édifier un bâtiment à usage de musée d'art contemporain dans le Bois de Boulogne, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne contre ce permis ; que les premiers juges ont estimé que la construction projetée ne respectait pas, du fait de son implantation au bord de l'allée Alphand, la règle de retrait par rapport à la voie publique énoncée par les dispositions de l'article ND 6 du règlement du plan d'occupation des sols de la VILLE DE PARIS, redevenu applicable, et que l'environnement du terrain d'assiette de l'édifice ne permettait pas de justifier une telle implantation en vertu de l'exception à cette règle par ailleurs prévue par ces dispositions ; que la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION et la VILLE DE PARIS relèvent appel de ce jugement et contestent le bien-fondé du motif d'annulation ainsi retenu par le Tribunal administratif de Paris ; que la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne soutient que les dispositions de l'article ND 6 ont également été méconnues en ce qui concerne l'implantation de la future construction par rapport à l'avenue du Mahatma Gandhi et à la route de la Porte Saint-James ; qu'en outre, ladite Coordination reprend notamment son moyen, déjà invoqué en première instance, selon lequel les dispositions de l'article ND 7 du règlement du plan d'occupation des sols auraient aussi été méconnues ;

Sur l'applicabilité de l'article 10 de la loi du 26 mai 2011 :

Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 26 mai 2011 relative au prix du livre numérique, promulguée au cours de la procédure juridictionnelle engagée dans le cadre du présent litige : " Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés, à la date de leur délivrance, les permis de construire accordés à Paris en tant que leur légalité a été ou serait contestée pour un motif tiré du non-respect des articles ND 6 et ND 7 du règlement du plan d'occupation des sols remis en vigueur à la suite de l'annulation par le Conseil d'État des articles N 6 et N 7 du règlement du plan local d'urbanisme approuvé par délibération des 12 et 13 juin 2006 du Conseil de Paris " ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) " ; que l'Etat ne peut, sans méconnaître ces stipulations, porter atteinte au droit de toute personne à un procès équitable en prenant, au cours d'un procès, des mesures législatives à portée rétroactive qui ont pour effet de faire obstacle à ce que la décision faisant l'objet de ce procès puisse être utilement contestée, sauf lorsque l'intervention de ces mesures est justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général ;

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les parties appelantes, le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions législatives susmentionnées avec les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est opérant dès lors que le présent litige, relatif à la légalité d'un permis de construire, concerne des droits et obligations de caractère civil ; que la circonstance que la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne ne défende pas des intérêts patrimoniaux mais la préservation d'un site est sans incidence sur la nature dudit litige et, par suite, sur l'opérance du moyen ainsi soulevé ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article 10 de la loi du 26 mai 2011, dont l'adoption est intervenue au cours de l'instance introduite devant la Cour et ne pouvait être regardée comme prévisible, ont une portée rétroactive qui a pour effet de faire obstacle à ce que la légalité du permis de construire attaqué puisse être utilement contestée, notamment, pour le motif retenu en première instance par le Tribunal administratif de Paris ; que ces dispositions portent ainsi atteinte au droit de la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne à un procès équitable ;

Considérant que cette validation législative, qui vise à faire obstacle aux conséquences de la remise en vigueur d'anciennes dispositions du P.O.S. de Paris, ne saurait être regardée comme ayant pour objet de remédier à une simple " faille technique du droit " au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ; qu'elle ne saurait non plus être considérée comme visant à neutraliser l'" effet d'aubaine " dont bénéficierait, selon les appelantes, la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne en raison de la remise en vigueur d'articles du P.O.S., dès lors que cette dernière résulte des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme et de l'annulation partielle du P.L.U. de Paris prononcée par le Conseil d'Etat sur un précédent recours de ladite association ; que si cette validation législative repose sur des motifs d'intérêt général, tenant en particulier au fait que la création du musée d'art contemporain envisagé présente un intérêt culturel, urbanistique, architectural et économique de nature à renforcer l'attractivité touristique de la ville de Paris et à mettre en valeur le Jardin d'acclimatation, lesdits motifs ne revêtent cependant pas, en l'espèce, un caractère impérieux, qui serait seul susceptible de justifier l'atteinte ainsi portée au droit à un procès équitable ; que la circonstance, invoquée par la FONDATION, qu'elle subirait un préjudice financier très important en cas d'annulation du permis de construire n'est pas de nature, dans les circonstances de l'espèce, à justifier la validation législative en cause ; que, dès lors, les dispositions de l'article 10 de la loi du 26 mai 2011 ne sont pas compatibles avec les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne est, par suite, fondée à demander que leur application soit écartée pour apprécier la légalité du permis de construire litigieux ;

Sur le bien-fondé du moyen d'annulation retenu par le Tribunal administratif de Paris :

Considérant qu'aux termes de l'article ND 6 du règlement du plan d'occupation des sols, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques et privées, applicable en l'espèce : " L'implantation doit être suffisamment en retrait d'une voie pour permettre la réalisation d'une isolation paysagère du bâtiment, sauf si l'environnement justifie une implantation en bordure de rue " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'allée Alphand, située en limite du terrain d'assiette de la construction litigieuse, a la forme d'un anneau elliptique qui est intégralement compris dans le périmètre du Jardin d'acclimatation ; que, destinée à permettre la seule desserte des installations de ce parc de loisirs, elle n'a pas pour objet d'assurer la circulation du public entre celui-ci et le reste du Bois de Boulogne ; que, bien qu'asphaltée et d'une largeur minimale de cinq mètres, cette allée, fermée par des grilles en dehors des heures d'ouverture du Jardin d'acclimatation, n'est accessible que pendant ces seules heures aux personnes ayant acquitté un droit d'entrée ; qu'elle n'est pas accessible aux véhicules motorisés, à l'exception des véhicules de secours et de ceux assurant des livraisons ; qu'eu égard à l'ensemble de ses caractéristiques, cette allée ne peut ainsi être regardée comme une voie au sens des dispositions précitées ; que, dès lors, la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION et la VILLE DE PARIS sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a retenu que l'implantation du bâtiment envisagé par rapport à ladite allée méconnaissait les dispositions précitées de l'article ND 6 du règlement du P.O.S. pour annuler le permis de construire délivré le 8 août 2007 à la FONDATION ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne, tant en première instance qu'en appel, à l'appui de ses conclusions en annulation ;

Sur les autres moyens invoqués à l'encontre du permis de construire attaqué :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 341-10 du code de l'environnement : " Les monuments naturels ou les sites classés ne peuvent ni être détruits ni être modifiés dans leur état ou leur aspect sauf autorisation spéciale " ; qu'aux termes de l'article R. 341-13 du même code : " Lorsqu'il statue pour l'application de l'article L. 341-10, le ministre décide après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, et, chaque fois qu'il le juge utile, de la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages. Toutefois, l'avis de la commission départementale n'est pas requis lorsque le ministre évoque le dossier " ; qu'il résulte de ces dispositions que le ministre n'était pas tenu de consulter la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages ; qu'il ressort par ailleurs des pièces du dossier que la commission départementale de la nature, des paysages et des sites de Paris a émis un avis, au demeurant favorable, sur le projet envisagé le 10 mai 2007, avant que le ministre de l'écologie et du développement durable n'accorde l'autorisation requise le 1er juillet 2007 ; qu'enfin, la circonstance, invoquée par la Coordination, que le pétitionnaire avait joint au dossier des pièces complémentaires postérieurement aux avis rendus par l'architecte des bâtiments de France et par la commission départementale précitée est sans incidence sur la légalité du permis litigieux dès lors que ces documents n'emportaient pas de modification du projet et que leur production n'était donc pas de nature à imposer un renouvellement des consultations opérées ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le ministre n'aurait pas donné son autorisation au projet en cause dans le respect des dispositions précitées du code de l'environnement doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 341-17 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date du permis attaqué : " La commission départementale de la nature, des paysages et des sites est présidée par le préfet, et à Paris par le préfet de police (...). " ; qu'il est constant que cette commission était présidée par le préfet, secrétaire général de la préfecture de Paris lorsqu'elle a émis, le 10 mai 2007, un avis sur le projet contesté ;

Considérant que, s'agissant des irrégularités commises lors de la consultation d'un organisme, il ressort d'un principe, dont s'inspire désormais l'article 70 de la loi du 17 mai 2011 susvisée, que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment au fait que le préfet de Paris et le préfet de police sont tous deux, en vertu des dispositions de l'article L. 2512-12 du code général des collectivités territoriales, les représentants de l'Etat sur le territoire de la ville de Paris, que la circonstance que la présidence de la commission susmentionnée a été assurée dans des conditions irrégulières ait été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'elle ait privé les intéressés d'une garantie ; que, par suite, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner l'annulation du permis contesté ;


En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que si un permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation ; que, par suite, la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne ne saurait utilement se borner à soutenir, sans invoquer d'exception d'illégalité à l'encontre du P.L.U., que le permis de construire litigieux a été délivré en méconnaissance de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme, définissant les caractéristiques des zones naturelles et forestières, dites " zones N ", en tant qu'il n'autorise les constructions dans un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées qu'à la condition qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des sites, milieux naturels et paysages ; que ce moyen ne peut ainsi qu'être écarté comme inopérant ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article ND 1-II-b du règlement du P.O.S., ayant pour objet d'autoriser les équipements nouveaux qui sont en relation avec le caractère de la zone, et l'article ND 10 du même règlement, aux termes duquel " les constructions nouvelles ne pourront pas, en principe, dépasser le plan horizontal atteint par le plus haut des bâtiments existants situés en zone ND dans un rayon de 500 mètres autour desdites constructions ", n'étaient plus applicables à la date du permis attaqué, dès lors que s'y étaient substituées les dispositions équivalentes du règlement du P.L.U. ; que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de ces articles sont donc également inopérants ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article ND 6 du règlement du P.O.S., relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques et privées, déjà cité plus haut : " L'implantation doit être suffisamment en retrait d'une voie pour permettre la réalisation d'une isolation paysagère du bâtiment, sauf si l'environnement justifie une implantation en bordure de rue " ; que la Coordination soutient que ces dispositions ont été méconnues en ce qui concerne la façade sud du projet de construction, implantée au bord de l'avenue du Mahatma Gandhi et de la route de la Porte Saint-James ; que si cette avenue et cette route constituent des voies publiques, il ressort des pièces du dossier que la façade en cause est implantée suffisamment en retrait pour permettre la réalisation d'une isolation paysagère du bâtiment ; que, dans les circonstances de l'espèce, le fait que les " voiles de verre ", constituant de simples ornements installés au sommet du bâtiment, surplombent les accotements de l'avenue du Mahatma Gandhi n'est pas de nature à faire regarder le projet comme méconnaissant les dispositions précitées de l'article ND 6 du règlement du P.O.S. ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article ND 7 du règlement du P.O.S., relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites des espaces verts, concessions et équipements publics : " Les bâtiments ou installations doivent être implantés au moins à 6 mètres des limites. Ils peuvent toutefois être adossés aux murs pignons ou aux murs de clôture existant sur ces limites. Les marges d'isolement doivent faire l'objet d'un aménagement paysager " ; que, d'une part, la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne ne saurait utilement se prévaloir de ces dispositions pour soutenir que la construction envisagée n'aurait pu légalement être implantée à moins de 6 mètres de l'avenue du Mahatma Gandhi et de la route de la Porte Saint-James, dès lors que lesdites dispositions ne régissent pas l'implantation des constructions par rapport aux voies publiques ; que, d'autre part, la Coordination ne saurait davantage utilement se prévaloir du fait que le bâtiment projeté est implanté à moins de 6 mètres de la limite séparant la concession accordée à la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION de celle du Jardin d'acclimatation, dès lors que les limites visées par cet article ne sauraient être que les limites d'une unité foncière et qu'il est constant que, même s'ils constituent deux concessions distinctes, le musée envisagé et ce jardin relèvent de la même unité foncière ; qu'en outre, le bâtiment en cause est implanté à plus de 6 mètres des espaces verts du site du Bois de Boulogne ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il n'est pas contesté que l'emprise au sol des bâtiments démolis à usage de bowling qui étaient précédemment implantés sur le terrain d'assiette de la construction envisagée s'élevait à 4 166,50 mètres carrés, tandis que celle du futur édifice ne sera que de 4 156 mètres carrés ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le projet étendrait l'emprise au sol des constructions en méconnaissance des dispositions de l'article
N 9-2 du règlement du P.L.U., qui limitent à 3 % l'augmentation de cette emprise dans les secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées, manque en fait ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article N 10-2 du règlement du P.L.U., relatif aux dispositions applicables dans les secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées : " Les constructions nouvelles ne doivent pas comporter plus d'un rez-de-chaussée et un étage. Toutefois, il peut être admis de réaliser des planchers partiels à l'intérieur de ces niveaux sous forme de mezzanines ou de gradins, dans la limite d'un tiers de l'emprise au sol des constructions (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier de la demande de permis de construire que, d'une part, nonobstant la circonstance qu'elles ne soient pas ouvertes sur l'espace du rez-de-chaussée, les quatre surfaces, non reliées entre elles, destinées à héberger des locaux techniques, des sanitaires et un espace de documentation, situées entre les cotes de niveau 36,20 et 39,70 en surplomb de 26 % de l'emprise au sol des constructions, doivent être regardées comme constituant des mezzanines au sens des dispositions précitées ; que, d'autre part, les trois surfaces échelonnées entre les cotes de niveau 41,80 et 50,70, qui correspondent à des parties différentes du bâtiment et dont aucune ne se superpose à une autre, constituent un même étage ; qu'enfin, les toitures-terrasses situées au-dessus de cet étage, destinées à être plantées d'arbres et de jardins suspendus, sont seulement surplombées par une structure discontinue de " voiles de verre " à caractère décoratif ménageant de larges ouvertures, qui ne saurait être considérée comme une toiture ; qu'ainsi, ces toitures-terrasses ne constituent pas un second étage ; que, par suite, la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne n'est pas fondée à soutenir que la construction autorisée comporterait plus de deux niveaux et méconnaîtrait ainsi la règle de hauteur exprimée sous forme de niveaux énoncée par les dispositions précitées ;

Considérant, en septième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article N 11-1 du règlement du P.L.U. : " Les constructions, installations et ouvrages doivent participer à la mise en valeur du milieu naturel, des sites, paysages ou compositions paysagères de la zone " ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des documents graphiques produits à l'appui de la demande de permis de construire, que, compte tenu de sa qualité architecturale, le bâtiment projeté participe à la mise en valeur du site du Bois de Boulogne ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit, dès lors, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION et la VILLE DE PARIS sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne, le permis de construire en date du 8 août 2007 par lequel le maire de Paris a autorisé la FONDATION à édifier un bâtiment à usage de musée d'art contemporain dans le Bois de Boulogne, ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux dirigé contre ce permis ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la FONDATION D'ENTREPRISE LOUIS VUITTON POUR LA CREATION et de la VILLE DE PARIS, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement à la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties appelantes présentées sur le fondement de ces mêmes dispositions ;


D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0802827 du Tribunal administratif de Paris du 20 janvier 2011 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la Coordination pour la sauvegarde du Bois de Boulogne devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions des parties présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
''
''
''
''
9
N° 11PA00758 - 11PA00812



Retourner en haut de la page