Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 26/04/2013, 352246, Inédit au recueil Lebon

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 août et 26 octobre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme C...A..., demeurant ... ; Mme A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10BX02846 du 27 juin 2011 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en ce qu'il a, à la demande de M. D...B..., annulé le permis de construire délivré à la requérante le 15 juillet 2008 par le maire de Lamothe-Goas en tant que le permis autorisait la construction d'une maison sur la parcelle cadastrée ZH 137p et réformé en ce sens le jugement n° 0900236 du 14 septembre 2010 du tribunal administratif de Pau ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de M. B...;

3°) de mettre à la charge de M. B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vincent, Ohl, avocat de MmeA..., et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M.B...,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vincent, Ohl, avocat de Mme A..., et à la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. B...;




1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 15 juillet 2008, le maire de Lamothe-Goas, agissant au nom de l'Etat, a délivré à Mme A...un permis de construire pour la construction d'un siège d'exploitation agricole comprenant un hangar agricole et une maison d'habitation, sur la parcelle ZH 137p ; que M.B..., propriétaire d'un ensemble immobilier à usage agricole situé à proximité de cette parcelle, a saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à l'annulation de cet arrêté, qui a été rejetée par un jugement du 14 septembre 2010 ; que, par un arrêt du 27 juin 2011, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, à la demande de M.B..., annulé le permis de construire délivré le 15 juillet 2008 à Mme A...en tant qu'il autorise la construction d'une maison sur la parcelle cadastrée ZH 137p, réformé en ce sens le jugement du tribunal administratif de Pau et rejeté le surplus des conclusions de la requête d'appel de M. B... ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il fait partiellement droit aux conclusions d'appel de M. B...; que ce dernier, par la voie du pourvoi incident, conteste ce même arrêt en ce qu'il rejette le surplus de ses conclusions tendant à l'annulation du permis de construire litigieux en tant qu'il autorise également la construction d'un hangar agricole ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable à la date de l'arrêté litigieux : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : / (...) / 2° Les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs, à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens du voyage, à l'exploitation agricole, à la mise en valeur des ressources naturelles et à la réalisation d'opérations d'intérêt national (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, dans les communes dépourvues de tout plan d'urbanisme ou de carte communale, la règle de constructibilité limitée n'autorise, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, que les constructions et installations nécessaires, notamment, à l'exploitation agricole ; que ce lien de nécessité, qui doit faire l'objet d'un examen au cas par cas, s'apprécie entre, d'une part, la nature et le fonctionnement des activités de l'exploitation agricole et, d'autre part, la destination de la construction ou de l'installation projetée ; qu'il s'ensuit que la seule qualité d'exploitant agricole du pétitionnaire ne suffit pas à caractériser un tel lien ; que, lorsque la construction envisagée est à usage d'habitation, il convient d'apprécier le caractère indispensable de la présence permanente de l'exploitant sur l'exploitation au regard de la nature et du fonctionnement des activités de l'exploitation agricole ;

Sur le pourvoi principal :

4. Considérant qu'en relevant que Mme A...ne mettait pas en valeur elle-même ses terres situées sur la commune de Lamothe-Goas et que ces terres ne représentaient qu'un peu plus de 40 % de son exploitation pour en déduire que la construction d'une maison d'habitation sur la parcelle ZH 137p ne pouvait être regardée comme une construction nécessaire à l'exploitation agricole, la cour administrative d'appel de Bordeaux s'est fondée sur des critères ne permettant pas de vérifier le caractère indispensable de la présence permanente de Mme A... sur l'exploitation ; que, ce faisant, elle a commis une erreur de droit ; qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, Mme A... est fondée à demander l'annulation de l'arrêt du 27 juin 2011 en tant qu'il annule le permis de construire délivré le 15 juillet 2008 par le maire de Lamothe-Goas en tant qu'il autorise la construction d'une maison sur la parcelle cadastrée ZH 137p et qu'il réforme en ce sens le jugement du tribunal administratif du Pau du 14 septembre 2010 ;

Sur le pourvoi incident :

5. Considérant qu'en se bornant à relever que Mme A...avait la qualité d'exploitant agricole et qu'une partie de ses parcelles étaient situées sur le territoire de la commune de Lamothe-Goas, sans rechercher si, compte tenu de sa destination, le hangar agricole projeté était nécessaire au fonctionnement de l'exploitation agricole de MmeA..., la cour administrative d'appel de Bordeaux a commis une erreur de droit ; qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 27 juin 2011 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa requête d'appel, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées, d'une part, par MmeA..., d'autre part, par M.B..., au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 27 juin 2011 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : Les conclusions de Mme A...et de M. B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme C...A...et à M. D...B....
Copie en sera adressée pour information à la commune de Lamothe-Goas et à la ministre de l'égalité des territoires et du logement.

ECLI:FR:CESJS:2013:352246.20130426
Retourner en haut de la page