Décision nos 93-1163, 1275, 1361 du 1er juillet 1993

Version initiale


Le Conseil constitutionnel,
Vu 1° la requête présentée par M. Michel Lefebvre, demeurant à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 23 mars 1993, et tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 21 mars 1993 dans la 7e circonscription des Yvelines pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu 2° la requête présentée par Mme Michèle Ferrieu, demeurant à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), enregistrée comme ci-dessus le 7 avril 1993, et tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 7e circonscription des Yvelines pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu 3° la requête présentée par Mme Catherine Simon, demeurant à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), enregistrée comme ci-dessus le 8 avril 1993, et tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 7e circonscription des Yvelines pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu les observations présentées par le ministre de l’intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 2 juin 1993 ;
Vu l’article 59 de la Constitution ;
Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et sénateurs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu :
Considérant que les requêtes de M. Lefebvre, de Mme Ferrieu et de Mme Simon sont dirigées contre les mêmes opérations électorales ; qu’il y a lieu de la joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur la requête de M. Lefebvre :
Considérant que les opérations électorales du premier tour de scrutin qui se sont déroulées le 21 mars 1993 dans la 7e circonscription des Yvelines n’ont donné lieu à l’élection d’aucun député ; que, dès lors, les conclusions de la requête de M. Lefebvre, qui ne sont dirigées que contre ces seules opérations, ne sont pas recevables ;
Sur la requête de Mme Ferrieu :
Considérant qu’à l’appui des conclusions de sa requête tendant à l’annulation de l’élection de M. Pierre Cardo Mme Ferrieu se borne à faire état d’allégations générales relatives aux activités professionnelles de M. Cardo, ainsi qu’aux conditions dans lesquelles ce dernier exerce son mandat de maire de la commune de Chanteloup-les-Vignes ; que de telles allégations ne sont, en tout état de cause, pas susceptibles d’affecter la régularité des opérations électorales contestées ; que la requête de Mme Ferrieu doit, par suite, être rejetée ;
Sur la requête de Mme Simon :
Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme Catherine Simon a déposé à la préfecture, dans les délais légaux, sa candidature pour l’élection législative qui s’est déroulée le 21 mars 1993 dans la 7e circonscription des Yvelines ; que les bulletins de vote en sa faveur, diffusés par les soins de la commission de propagande, instituée en application de l’article L. 166 du code électoral, portaient la mention « Génération verte » ; que l’un de ses adversaires au premier tour de scrutin, Mme Monique Le Saux, estimant que l’utilisation de cette dénomination ainsi que le graphisme employé sur lesdits bulletins de vote étaient de nature à entraîner une confusion dans l’esprit des électeurs entre le mouvement « Génération écologie », qui lui apportait son soutien, et l’étiquette politique choisie par Mme Simon, a saisi en référé le président du tribunal de grande instance de Versailles aux fins d’obtenir que soient retirés les bulletins de vote litigieux et qu’il soit interdit à Mme Simon d’utiliser, sur tout document électoral, le titre « Génération verte » ; que, ce magistrat ayant décliné sa compétence pour connaître d’une telle demande, la cour d’appel de Versailles, saisie par Mme Le Saux, a par un arrêt du 19 mars 1993 interdit à Mme Simon d’utiliser sur tout document électoral, et notamment sur les bulletins de vote, la mention « Génération verte » dans le graphisme qui avait été retenu, et a ordonné l’affichage de l’arrêt dans chaque bureau de vote et en caractères apparents ;
Considérant que Mme Simon fait valoir devant le Conseil constitutionnel que cette décision de l’autorité judiciaire, qui n’avait pas compétence pour intervenir dans le déroulement des opérations préliminaires à une élection législative, l’a privée des suffrages d’un nombre important d’électeurs et a été par suite de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
Considérant que les décisions de la commission de propagande d’assurer la diffusion des circulaires et des bulletins de vote des candidats à une élection législative qui répondent aux conditions légales, en application des dispositions combinées des articles L. 166, R. 34 et R. 38 du code électoral, constituent des actes préliminaires aux opérations électorales qui, en l’état de la législation, ne peuvent être contestés que devant le Conseil constitutionnel, juge de l’élection, à l’occasion du contentieux des opérations électorales ; qu’il suit de là qu’il n’appartient pas aux juridictions de l’ordre judiciaire d’enjoindre à un candidat de cesser d’utiliser une dénomination figurant sur les bulletins de vote diffusés par la commission de propagande ou de faire obstacle directement ou indirectement à l’utilisation de ces bulletins par les électeurs ;
Considérant toutefois que l’utilisation de la dénomination « Génération verte » était de nature à susciter la confusion, dans l’esprit des électeurs, avec les dénominations « Génération écologie » et « Les Verts » déjà utilisées ; que ce risque de confusion était encore aggravé par le choix du graphisme employé sur les documents électoraux ; que dès lors, dans les circonstances de l’espèce, l’intervention de l’arrêt susmentionné ne saurait avoir eu pour effet d’altérer la sincérité du scrutin ; qu’il suit de là que l’unique grief invoqué par Mme Simon doit être écarté ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les requêtes susvisées doivent être rejetées,
Décide :

  • Art. 1er. - Les requêtes de M. Michel Lefebvre, de Mme Michèle Ferrieu et de Mme Catherine Simon sont rejetées.

  • Art. 2. - La présente décision sera notifiée à l’Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

  • Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er juillet 1993, où siégeaient MM. Robert Badinter, président, Robert Fabre, Maurice Faure, Marcel Rudloff, Georges Abadie, Jean Cabannes, Jacques Latscha et Mme Noëlle Lenoir.

Le président,
ROBERT BADINTER
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